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3. La filière manioc au Bénin
La filière manioc au Bénin a fait l’objet de nombreuses études,
parmi lesquelles ont été consultées au cours de la
mission (cf annexe 2, § 1.3 Sources d’informations consultées):
- Les études réalisées par le GERAM :
-
Projet de promotion de l'élevage et préparation d'actions
intégrées : étude de la filière manioc dans
le ZOU (MCAC, Juillet 90)
-
Filière manioc : étude de l’opportunité d’une valorisation
dans le ZOU-Nord (CIDR / Programme de coopération décentralisée
ZOU - PICARDIE pour la promotion du développement local, Juin 1996)
-
Etude d’accompagnement sur la filière cossettes de manioc au BENIN
(MCAC, Novembre 1996)
- L’étude réalisée pour la FAO :
-
Projet de promotion et de diversification des exportations - rapport de
la mission de préparation (FAO, ref 96/027 ADB-BEN, 8/3/96)
- L’étude réalisée pour l'agence danoise de coopération
internationale dans le cadre du Programme d’Appui au Développement
du Secteur Agricole - PADSA :
-
Valorisation du manioc : techniques, problèmes et perspectives (rapport
provisoire PADSA / projet de développement des systèmes post-récolte,
Novembre 1997)
- L’étude réalisée par la CFD dans le cadre
du projet d’amélioration et de diversification des systèmes
d’exploitation dans les départements du ZOU et du BORGOU :
-
Etude de faisabilité du programme d’appui aux filières anacarde,
arachide, manioc, pomme de terre et haricot sec ; sous-programme manioc
(Septembre 1997)
L’analyse de la filière, à partir des travaux déjà
réalisés par le GERAM et de la mission conjointe TECH-DEV
/ GERAM dans le ZOU du 04/12 au 07/12/97, ainsi que des propositions d'amélioration
de la filière traditionnelle, font l’objet du rapport, en annexe
3, établi par le GERAM dans le cadre de cette étude.
3.1.
Historique de la culture du manioc au Bénin
Le LARES (Professeur John IGUE), sur la base des travaux de M. MIEGE, agro-ethnologue,
présente l’histoire de la culture du manioc de la façon suivante: contrairement aux produits vivriers " civilisationnels " comme le riz
(Casamance, Guinée), le mil et le sorgho (Ghana, Mali), l’igname
(pays du golfe de Guinée, de la Côte d’Ivoire au Nigéria)
et la banane plantain (Cameroun, Afrique Centrale), le manioc est un produit
vivrier " récent " : il a été importé par
les Africains des Amériques, en particulier du Brésil, de
retour en Afrique de l’Ouest.
La culture du manioc a alors connu un développement très
important au Bénin, de même que les techniques de sa transformation
en gari (" importation " des habitudes alimentaires brésiliennes
- farinha ).
Par ailleurs, cette culture a connu un développement intensif
au Togo entre les 2 guerres, pour son usage industriel (amidon pour l’industrie
textile) ; ceci a contribué à l’extension de ces cultures
dans l’Ouest du Bénin.
De plus, le développement des palmeraies a engendré la
nécessité de développer une culture peu exigeante
en main-d’oeuvre et à rendement élevé, contribuant
à l’alimentation des populations rurales ; la culture du manioc
répondait précisément à ce contexte.
Le manioc devient une plante "commerciale" dès 1975, avec
la demande croissante des pays frontaliers comme le Niger et le Nigéria
(importation de gari sous l’influence des béninois immigrés
dans ces pays, attirés par le boom des matières premières
dans ces pays).
Aujourd’hui, de nouveaux enjeux apparaissent :
-
la demande croissante du marché international (en particulier
européen) de cossettes de manioc en tant que PSC (produit
de substitution des céréales) dans la composition d’aliment
du bétail,la contribution des produits déshydratés
dérivés du manioc (gari, tapioca, attiéké,
farine de cossettes, ...)
-
à la sécurité alimentaire des concentrations urbaines
: longue durée de conservation, prix à la consommation plus
faibles que celui d’autres produits alimentaires de base comme le maïs,
le mil, le sorgho, le riz, ....
Cependant, malgré ce contexte favorable, la production de manioc
stagne ; le LARES (Professeur John IGUE) attribue cette situation au fait
que, dans la logique paysanne, le producteur privilégie la sécurité
de son alimentation (auto-consommation) et la régularité
de ses revenus (prix régulateur offrant une garantie suffisante),
ceci dans le respect de l’équilibre avec son milieu, plutôt
qu'une activité spéculative, dont l'avenir n'est pas assuré,
du fait de l'absence d'organisation de la filière.
Tout projet de développement de la production doit intégrer
cette logique paysanne, en cherchant à sécuriser les revenus
du producteur par un système de prix stable, suffisament rémunérateur,
régulé suivant une amélioration progressive et planifiée.
3.2 Les produits dérivés du manioc et leurs utilisations
3.2.1. Alimentation de base pour l’homme
Le manioc est consommé par la majorité de la population,
plus particulièrement dans le Centre et le Sud du Bénin,
en complément du maïs (le Nord étant traditionnellement
une région de culture et de consommation d’igname, en complément
du mil et du sorgho).
Son prix faible en fait un aliment de base dont la consommation s’accroît
avec la paupérisation rurale et urbaine.
Le tubercule de manioc représente une réserve d’autoconsommation
pour le paysan (conservation dans le sol plusieurs mois) ; par contre sa
commercialisation en frais est limitée (une fois arraché,
le tubercule doit être consommé ou transformé dans
les 48 heures ; au-delà, les pertes sont très importantes,
jusqu'à 100%).
La consommation du manioc transformé se fait sous 2 formes essentielles
: le gari et la farine de cossettes de manioc ; 600 000 T de manioc
seraient transformées en gari, par an.
Le gari : il y a lieu de parler " des gari " plutôt
que " du gari " ; en effet, plusieurs qualités existent sur
le marché, en fonction de la variété des tubercules
utilisés et du mode de préparation : durée de la fermentation,
taille des grains, mode de séchage (100% cuisson sur feu de bois
ou finition par séchage au soleil, ...).
Le gari s’obtient à partir du manioc râpé,
puis fermenté, tamisé et grillé.
Le gari se consomme sec, en accompagnement d’haricots bouillis,
.., délayé dans de l’eau froide (boisson très prisée,
notamment par les jeunes), ou encore sous forme de " piron " : mélangée
à l’eau bouillie, on obtient une pâte solide, très
consistante, qui accompagne les sauces.
De même qu'au Togo, Ghana et Nigéria, le gari représente
au Benin une composante importante du régime alimentaire des populations,
tant rurales qu'urbaines; il est consommé par toutes les couches
de la population, en particulier les femmes et les enfants ; c'est l'aliment
de la sécurité alimentaire des foyers familiaux.
La valeur nutritive du gari peut être améliorée
par ajout de lait de coco, de lait concentré sucré, de sucre
et de jus de citron (cf annexe 3, page 4).
Une technique d'enrichissement du gari en protéines et
/ ou vitamine A à partir de soja et / ou d'huile de palme a été
mise au point par le département de Nutrition et Sciences alimentaires
de la Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université Nationale
du Bénin, en collaboration avec l'IITA d'Ibadan au Nigéria.
Le tapioca : il s’obtient à partir de l’amidon extrait
de la pulpe de manioc râpé ; délayé dans l’eau
(froide ou chaude), il est consommé sous forme d’une bouillie pouvant
être améliorée par adjonction de sucre, lait, lait
de coco, lait de soja, ....
La farine de cossettes : elle est obtenue par broyage au pilon
des cossettes séchées au soleil ; délayée dans
l’eau chaude, la pâte de farine de cossettes accompagne les sauces.
La farine de manioc peut être utilisée en substitution
ou en complément de la farine de blé pour la fabrication
de pain de manioc et de biscuits (cf § 4 ci-après et les extraits
du rapport sur la valorisation du manioc réalisé pour le
PADSA, en annexe 7.4) ; cet usage n’est pas actuellement développé
au Bénin. Des travaux de recherche ont été réalisés
dans ce domaine, notamment par l’IITA - Ibadan et par le CIRAD - Montpellier.
Cette utilisation représente un débouché d’avenir
pour la farine de manioc.
3.2.2. Usages industriels
L’amidon de manioc a de nombreux usages industriels dans le domaine
de l’industrie textile, de l’industrie pharmaceutique, de l’industrie alimentaire,
de l’industrie du bois, du papier, ...
Les industries pharmaceutiques et alimentaires exigent cependant un
produit de haute qualité.
Ces usages ne sont pas développés à l’heure actuelle
au Bénin, probablement du fait d'un marché trop étroit
et d'une concurrence vive sur le marché international.
3.2.3. Aliment du bétail - Provende
L'utilisation du manioc comme aliment du bétail n’est pas développée
au plan national, probablement pour des raisons culturelles, le manioc
étant avant tout destiné à l’alimentation de l’homme.
A noter, cependant, le projet des Etablissements ADEOSSI à Savè
pour la fabrication d’aliment du bétail à partir de tourteaux
d’arachide, en provenance de son unité d'extraction d'huile d'arachide,
et de cossettes de manioc, en substitution à la farine de maïs
; ce projet a été étudié en partenariat avec
les Etablissements GUYOMAC’H (FADE CFD en Mai 1995) ; cependant, cette
activité reste marginale (unité de fabrication d'aliment
du bétail actuellement à l'arrêt, cf § 3.4.2.B1
ci-dessous).
Par ailleurs, le marché international (en particulier européen)
est demandeur de cossettes de manioc en tant que PSC pour la composition
d’aliment du bétail.
Il s’agit d’un marché très important, occupé traditionnellemnt
par les pays d’Asie du Sud-Est (Thaïlande notamment), pour lequel
l’Afrique a un avantage comparatif (proximité géographique
par rapport à l'Europe).
Un partenariat a été récemment mis en place (Février
1996) entre la Coopérative du Gouessant (France) et l’Union Sous-Préfectorale
des Producteurs (USPP) de Zogbodomè pour l’exportation de cossettes
vers la Bretagne (objectif : 15 000 T par campagne à partir de 1998
- 1999).
Après 2 campagnes médiocres (2000 T exportées en
1996, pas d’exportation en 96 - 97), l’expérience se traduit par
un échec (arrêt des activités de la SARL SOBBECA prévu
fin 97 ; cf § 3.4.3).
3.3. Les prix à la consommation des produits alimentaires dérivés du manioc
3.3.1. Le gari
Le prix du gari est très variable suivant la période
de l’année, d’une part, et suivant sa qualité / son origine
géographique, d’autre part.
Cette variabilité apparaît dans les relevés des
prix sur les marchés périodiques, publiés par l’ONASA
(lettre d’information sur la sécurité alimentaire - système
d’alerte rapide LISA-SAR, Janvier et Juillet 1996, en annexe 4.1).
La moyenne annuelle du prix du gari " ordinaire " en 1996 (126
FCFA / Kg) est le plus bas des prix des produits agricoles suivies
par la Direction de la Promotion, de la Qualité des Produits et
du Conditionnement (DPQPC) - cf annexe 4.2.
Le gari est donc un produit alimentaire très économique.
La haute valeur calorifique du manioc (398 kcal/100 g de matière
sèche soit environ 126 kcal/100 g de tubercule) en fait un produit
essentiel de la sécurité alimentaire, en particulier
pour les populations les plus démunies, en milieu rural comme en
milieu urbain.
Par ailleurs, il existe également un marché pour le gari
"haut de gamme" ; celui produit dans la région de Savalou a une
réputation de très grande qualité ; son prix peut
atteindre 400 FCFA/Kg, certains acheteurs se rendant sur place pour en
faire l’acquisition.
Les super-marchés de Cotonou vendent du gari de 1er choix,
conditionné en sachets, à des prix très supérieurs
à celui du gari vendu en vrac (prix relevés par le
GERAM dans 3 super-marchés de Cotonou : 375 à 550 FCFA /
Kg, cf annexe 4.3).
De même, des produits à base de gari , auquel sont
ajoutés du sucre, du lait concentré, du lait de coco, du
jus de citron, des graines d'arachide, ... sont vendus à des prix
très élevés (entre 800 et 850 FCFA / Kg pour les produits
qui ont pu être identifiés, cf annexe 4.3).
Ces produits s'adressent à une clientèle aisée
dont il faudrait évaluer la demande potentielle ; il s'agit là
d'un marché nouveau qui offre des opportunités rémunératrices.
Il serait intéressant de se rapprocher du Diocèse de Cotonou
(CFPAA) et du projet "PRO'LOCAUX" qui distribuent ces produits (cf annexe
4.3), afin de connaître l'origine de leur fabrication, leur prix
de revient, ....
A noter que le Groupement de Femmes de Wadokpo est le seul groupement
rencontré qui fabrique ce type de gari amélioré
(cf § 3.5.1.A ci-dessous).
3.3.2. Farines de cosettes de manioc
Traditionnellement, les cossettes de manioc sont achetées sur
les marchés et pilées à domicile pour être transformées
en farine.
Le prix moyen des cossettes de manioc sur les marchés en 1996
est de 70 FCFA / Kg (cf annexe 4.1).
Cependant, commencent à apparaître sur les rayons des super-marchés
de Cotonou des farines de cossettes de manioc ou d'igname, conditionnées
en sachets de 500 g et 1 Kg.
Les prix relevés (annexe 4.3) ne sont pas suffisamment représentatifs
et présentent des discordances importantes (farine de cossettes
d'igname) ; il sera donc nécessaire d'approfondir l'enquête
de prix.
Il y a lieu de noter la vente à Cotonou de farines produites
au Ghana par ELSA-FOODS Ltd (cf encadré du § 4.1.1 ci-dessous).
Il s'agit là aussi d'un marché potentiel en milieu urbain,
certainement très rémunérateur.
3.4.
Les différentes composantes de la filière manioc
3.4.1. La production
Le manioc est cultivé dans les 6 départements du Bénin,
les départements de l’Ouémé, du Zou et de l’Atlantique
(Centre et Sud du Bénin) représentant 75% de la production
nationale de la campagne 1996-1997 (cf cartes jointes au rapport du GERAM
en annexe 3 et statistiques de production des Centres d’Action Régionale
pour le Développement Rural - CARDER en annexe 5.1).
La production de la campagne 1996-1997 (1 453 489 T) est en progression
régulière (+ 9,4%) par rapport à la campagne 1995-1996
(1 328 634 T).
Entre les campagnes 1990-1991 et 1996-1997 la progression est de +55%,
du fait de l’augmentation des surfaces cultivées ; le rendement
moyen à l’hectare est resté faible, entre 8,0 et 8,7 T/ha,
sur l’ensemble de la période (cf annexe 5.2).
Si les surfaces cultivées en maïs viennent en tête,
le manioc représente, au cours des campagnes 1995-96 et 1996-97
la plus forte production en tonnage, suivie de près par l’igname
(cf annexes 5.1 et 5.3) ; au cours des campagnes précédentes,
la production d’igname vient très légèrement en tête,
devant la production de manioc (cf annexe 5.4).
A cette prédominance quantitative, s'ajoute le fait que le rendement
calorique du manioc à l'hectare est très élevé
par rapport à d'autres cultures ; sur la base d'un rendement de
9 T / ha, le rendement calorique est de 9 T / ha x 127 Kcal / 100 g
= 11,4 x 10 puissance 6 Kcal / ha (pour le maïs : 7,6 x 10 puissance
6)
Le bilan vivrier national pour le manioc (campagne 1994-1995) met en
évidence un solde disponible de 405 409 T (soit 39% de la
production utile, laquelle correspond à 90% de la production totale),
après déduction de l'estimation de la consommation par les
populations dans les zones de production (cf bilan vivrier établi
par l’ONASA en annexe 5.5).
Ce solde disponible présente par ailleurs un potentiel de développement
considérable, à surfaces enblavées constantes, dans
la mesure où les rendements actuels à l’hectare sont faibles,
entre 5,3 et 14,6 T/ha (variétés locales sur terrain pauvre
et sans apport d’engrais), alors que des variétés sélectionnées
atteignent des rendements de 20 à 22 T/ha sans utilisation d’engrais
(avec assolement pour maintenir la fertilité du sol) et de plus
de 30 T/ha avec engrais (cf annexe 6).
Il existe donc une opportunité très intéressante
de développement significatif de la filière, à la
fois pour la sécurité alimentaire des grands centres urbains
et pour l'exportation vers l'Europe de cossettes, en tant que PSC pour
l'alimentation du bétail.
Cependant, la culture du manioc reste une culture pratiquée par
les paysans sur une base individuelle ; le nombre de parcelles (0,2 ha)
détenues par un même producteur est limité (entre 5
et 10) ; ces faibles superficies (en moyenne de l’ordre d’un hectare) ne
favorisent pas la mécanisation des cultures.
Les quelques expériences de plantations importantes qui nous
ont été rapportées, mettent en évidence le
problème de la non-disponibilité de main-d’oeuvre en quantité
suffisante pour les travaux de sarclage, arrachage, ... :
- ferme (plantation) des Etablissements ADEOSSI à Savè
: 3 200 ha dont seulement 100 ha de manioc avec un rendement annoncé
de 20 T/ha (variétés BEN et TMS) ; emblavement de 60 ha en
1997, alors qu'en 1995, la surface emblavée aurait été
de 240 ha.
En 1993, la Direction de l’entreprise a mis en place un programme
de mise en culture comprenant un volet culture industrielle
(emblavement en manioc de 900 ha à l'horizon 1997 / 1998 sur la
plantation ADEOSSI) et un volet culture paysanne contractualisée
(appui aux producteurs de la région, cf encadré ci-dessous).
Ce programme a bénéficié d'un prêt AIPB de
l'agence de la CFD à Cotonou, mis en place en 1994.
L'objectif de ce programme était d'approvisionner l’unité
gari en racines de manioc, en quantités suffisantes (cf §
3.2.2 ci-dessous).
Les raisons évoquées par la direction de l’entreprise
de la non réalisation de ce programme sont les suivantes :
-
culture industrielle : le faible niveau actuel d'emblavement en manioc
de la plantation serait dû à l'impossibilité de
trouver de la main-d'oeuvre pour les travaux dans la plantation.
-
culture paysanne : échec de la tentative de contractualisation des
achats aux producteurs du fait d'une approche des relations entre l'entreprise
et les paysans (problème de confiance, pas de motivation financière
suffisante ; cf encadré ci-contre)
plantation de Madame Juliette O’Gbonnikan à 6 Km de Savè,
en brousse (accès, par la piste, très difficile en saison
des pluies) : 54 ha achetés en 1989 (44 ha sont toujours en litige
avec les héritiers propriétaires) dont 5 ha emblavés
en manioc (variété TMS) en 1990 ; arrêt des activités
de fabrication de gari à une échelle semi-industrielle
(cf § 3.4.2 B2 ci-dessous) en Août 1993 ; la non-disponibilité
et le coût de la main-d’oeuvre sont évoqués comme
étant les |
|
Programme d’appui aux producteurs, initié
par les Etablissements ADEOSSI pour la campagne 1993-1994 ; entretien le
12/12/97 avec la Direction de l’entreprise ADEOSSI
Des crédits de campagne " revolving " aux producteurs de la région
de Savè ont assuré le pré-financement des coûts
de mise en culture, à hauteur de 50% ; l’objectif de ce dispositif
était la mise en culture de 500 ha supplémentaires par an
pendant 4 ans (cf dossier AIPB ADEOSSI).
Le bilan, aujourd'hui, est le suivant :
- certains prêts n’ont pas été remboursés,
- l’engagement de vente de manioc à l’usine ADEOSSI, pour un
montant au moins équivalent au montant prêté, n’a pas
été systématiquement respecté, les producteurs
préférant vendre au plus offrant,
- l’approvisionnement de l’unité gari proviendrait exclusivement
de la ferme ADEOSSI, ce qui est insuffisant pour assurer le niveau de production
nominal de l’unité.
L’analyse des causes probables de l’échec de cette expérience
est la suivante :
- une approche du producteur de type " acheteur / vendeur ",
- la forme du contrat qui ne prévoit pas de prix plancher (prix
garanti) préservant les intérêts des producteurs,
- pas de réelle relation de partenariat avec les producteurs
(problème de confiance).
Par ailleurs, la Direction de l'entreprise se pose la question : comment
faire respecter les clauses contractuelles ; quelle peut être l'autorité
compétente (?). |
principaux problèmes en ce qui concerne la culture de manioc
à une échelle "industrielle" (plantation).
Dans ce contexte, l'approvisionnement en quantité significative
d'unités semi-industrielles de transformation du manioc nécessite:
- de mettre en place une logistique de collecte auprès
des producteurs individuels,
- de leur apporter un appui technique (choix des variétés,
accès aux boutures sélectionnées, techniques d’assolement,
engrais, ...) et financier (crédits de campagne, achat sur
pied ou au comptant des tubercules, prix au Kg ou à l’ha suffisamment
attractif pour inciter le développement de cette spéculation),
- de développer une relation de confiance, de
type partenariale, entre acheteur et producteurs, seul moyen de
fidéliser les producteurs sur la base d'intérêts
partagés et de solidarité réciproque ; l'expérience
de la société SOBAP est à ce titre exemplaire (cf
encadré ci-dessous).
Modalités d’approvisionnement de l’usine SOPAB en coton brut
; entretien avec Monsieur ABIMBOLA, Directeur Général, à
Cotonou le 11/12/97 :
La société SOPAB (Société des Pansements
du Bénin) à Cotonou intègre son approvisionnement
en coton brut de la manière suivante :
-
culture industrielle dans la ferme de 100 ha à Kétou (Ouémé),
-
achat de coton - graines à des petits producteurs individuels réunis
en coopérative, sous l’impulsion de Monsieur ABIMBOLA,
originaire de la région, ancien Député, " reconnu
" par les producteurs, (contrats d'approvisionnement)
-
égrénage à façon dans les usines SONAPRA (usines
d'Etat),
-
transport jusqu’à l’usine SOPAB à Cotonou.
Les modalités pratiques de cette expérience, réussie,
mériteraient d’être approfondies pour servir de référence
pour l’approvisionnement de petites unités industrielles de transformation
du manioc en produits déshydratés |
3.4.2. La transformation
A. Le secteur traditionnel
La transformation du manioc, essentiellement en gari et
entapioca, est traditionnellement réalisée par les
femmes en milieu rural, à titre individuel ou en groupement (Groupements
de Femmes).
Cette production est d’abord réalisée pour l’autoconsommation
au niveau familial ; le surplus est vendu sur les marchés locaux
ou à des intermédiaires qui collectent le gari pour
le revendre sur les marchés de regroupement, avant d’être
acheminé vers les marchés urbains de consommation ou pour
être vendu dans les pays frontaliers (Niger, Nigéria, Togo),
ceci de façon informelle (cf annexe 8.1).
La transformation des cossettes de manioc séchées en farine
est réalisée traditionnellement à domicile par les
femmes (cossettes broyés au pilon).
A1. Transformation du manioc en gari au niveau individuel
Le travail individuel par les femmes est totalement manuel ;
certaines utilisent les services (payants, à la prestation) d’une
râpeuse motorisée, louée à un particulier ou
à un GF.
A2. Transformation du manioc en gari par les Groupements de Femmes
Des femmes en milieu rural décident de mettre en commun une partie
de leur temps et des moyens pour mener un certain nombre d'activités
agricoles et de transformation, comme la fabrication de gari..
Elles se regroupent de façon formelle au sein d'associations,
les Groupements de Femmes (GF), structurées avec un Bureau (Présidente,
Vice-Présidente, Trésorière), une (ou un) Animatrice
et une Secrétaire.
Cette existence juridique leur permet, entre autres, de bénéficier
d'appuis extérieurs, technique et financier.
Un recensement récent indique qu’il existe entre 250 et 270 GF,
ce qui représente un effectif global de plus de 2500 femmes.
Dans les 5 GF rencontrés au cours de la mission de terrain (cf
annexe 3), les femmes y travaillent à temps partiel (2 à
3 jours / semaine) ; elles se partagent en général 1/3 de
leur production de gari pour leur propre consommation ; le solde
de gari produit est vendu par le groupement, la recette permettant
de faire face aux coûts d’exploitation (achat des tubercules, consommables
- essence ou fuel - si le GF possède une râpeuse motorisée
-, ...), le surplus (bénéfice du GF) étant soit partagé
entre les membres, soit épargné auprès des Caisses
Locales de Crédit Agricole Mutuel (CLCAM) ou auprès des Caisses
Rurales d'Epargne et de Crédit (CREP), récemment mises en
place par SASAKAWA GLOBAL 2000 (cf § 4.1.2 ci-dessous).
Quelques GF (3 sur les 5 rencontrés) ont bénéficié
de l'appui financier d'ONG (SASAKAWA GLOBAL 2000, PAGF, Club International
des Femmes de Cotonou) pour l'acquisition d'une râpeuse mécanique.
Seul un des GF rencontrés a réalisé des foyers
(partiellement) améliorés - foyers fermés mais sans
cheminée d’évacuation des fumées.
Le travail des femmes, même lorsqu’elles se regroupent, reste
donc très pénible et dangereux pour leur santé
(en particulier au niveau du poste de travail rôtissage (cuisson),
où les opératrices sont exposées pendant de très
nombreuses heures consécutives - jusqu'à 10 heures par jour
- à la chaleur et à la fumée.
La transformation du gari occupe une grande partie de leur temps,
qui, de par cette activité, ne peut pas être consacré
à d'autres tâches.
La technologie traditionnelle de production de gari et de tapioca
peut être sensiblement améliorée par les dispositions
suivantes, simples, peu onéreuses et disponibles sur le marché
béninois :
-
La mécanisation du râpage : cette opération
est particulièrement longue, pénible et relativement dangereuse
(coupures fréquentes aux mains) lorsqu'elle est réalisée
avec une râpe manuelle (planche en bois sur laquelle est fixée
une feuille métallique avec aspérités pour le râpage
des racines épluchées).
-
Les GF rencontrés sont mécanisés, ou ont pour objectif
prioritaire de se mécaniser, au niveau du râpage : le premier
équipement dont ces groupements font l'acquisition, ou dont ils
prévoient l'acquisition en priorité, est une râpeuse
motorisée.
Il s'agit d'un matériel abordable financièrement pour
les GF, qui peut être rentabilisé par des prestations rémunérées,
réalisées pour le compte d'individus ou d'autres GF, et qui
est fabriqué au Bénin (cf § 5.1.2 ci-dessous).
-
L'utilisation de presses à vis pour le pressage: le pressage
traditionnel se fait à l'aide de lourdes pierres posées sur
les sacs ; l'utilisation de presses à vis (simple ou double) assure
un pressage plus efficace et évite la manipulation de charges particulièrement
importantes ; ces presses sont fabriquées au Bénin (cf §
5.1.4 ci-dessous) ; peu de GF disposent de presses à vis, cet équipement
n'étant pas cité comme prioritaire.
-
La réalisation de foyers améliorés pour le rôtissage
(cuisson) : par rapport à la cuisson sur feu nu (marmite à
fond plat posée sur 3 pierres) en plein air ou sous un simple auvent,
le foyer amélioré (foyer fermé, cheminée d'évacuation
des fumées) présente les avantages suivants :
- réduction de la consommation de bois de feu ; le bois peut également
être remplacé, à terme, par une rampe alimentée
en gaz ou en biogaz,
- protection des opératrices de la fumée.
Ces foyers peuvent être réalisés très simplement
à partir de matériaux locaux (briques de terre, argile, pisé).
Cependant, cette amélioration n'engendre pas de gain financier
direct, lorsque le bois n'est pas acheté ; il faut donc effectuer
un travail d'information auprès des responsables des GF pour
que ce type de foyers soit réalisé, en insistant notamment
sur la préservation de la santé des opératrices.
B. Les secteurs semi-industriel et industriel
Seuls les Etablissements ADEOSSI et Fils à Savè ont
réalisé une unité de transformation du manioc de type
industriel, actuellement en activité.
A signaler l'expérience de Madame Juliette O'Gbonnikan à
Savè, qui a réalisé en 1990 une petite unité
semi-industrielle pour la fabrication de gari ; cependant, l'exploitation
de l'unité a été arrêtée à l'issue
de la campagne 1992 - 93 pour les raisons rappelées au § B2
ci-après.
B1. Etablissements ADEOSSI et Fils à Savè
L' installation industrielle des Etablissements ADEOSSI à Savè
comprend :
-
une unité d'extraction d'huile d'arachide et de graines de coton,
la production d'huile de graine de coton représentant 50% du chiffre
d'affaire de l'usine, l'activité huile d'arachide étant marginale,
-
la provenderie (à l'arrêt),
-
une installation de séchage de cossettes de manioc sur des claies
à l'air libre (activité marginale),
-
l'unité "gari" pour la fabrication :
de gari 1er et 2ème choix (sacs de 25 Kg), .de farines composées
(50% farine de cossettes de manioc, 50% farine de maïs, sacs de 25
Kg), d'amidon (marginal, vendus aux pressings à Cotonou), de "fufu
"ou "lafu " (rouissage - fermentation des tubercules dans l'eau
- puis pressage, cuisson en sacs de 20 Kg de poudre). Le gari est
vendu à la porte de l'usine à Savè et au siège
de la société à Cotonou ; le gari représente
l'activité principale, les autres produits n'étant fabriqués
qu'en quantités faibles.
L'unité "gari" était à l'arrêt le
jour de la visite (groupe électrogène en panne) ; les installations
ont cependant pu être visitées de façon approfondie
avec la participation du personnel technique d'encadrement de la fabrication.
Le bâtiment (env 80 x 20 m) a été construit en 1992.
Les équipements ont, pour la plupart, été achetés
au Nigeria entre 1992 (râpeuses, premiers cuiseurs) et 1995 (cuiseurs
actuels).
Seul l'épluchage est manuel ; toutes les autres opérations
sont mécanisées.
Le descriptif technique des différents postes de travail (caractéristiques
des équipements, capacité nominale du poste) figure en annexe
9.
L'effectif permanent de l'unité gari est de 5 personnes
(encadrement) ; de plus, 15 hommes et 40 à 80 femmes (épluchage)
sont recrutés occasionnellement, en fonction de la charge de travail.
La production annuelle de gari a été de 1350 tonnes
en 1994, 95 et 96, soit une moyenne de 5 T / j de gari (entretien
à Cotonou avec la Direction de l'entreprise), correspondant à20 T / j de racines fraîches soit 6200 tonnes / an.
Or, l'unité aurait été dimensionnée pour
une capacité nominale de 120 T / j de racines fraîches (entretien
à Cotonou avec la Direction de l'entreprise) ; ce chiffre correspond
à peu près à la capacité nominale du poste
râpage, cependant le poste rôtissage (cuisson) ne permet certainement
pas de traiter une telle quantité journalière (?).
A noter que l'épluchage de 120 T / j nécessiterait 240
femmes pendant 10 h / j sur la base de 100 Kg en 2 heures (cf annexe 7.1).
La rentabilité de l'unité, aux dires de la direction de
l'entreprise, devrait se situer à 50% de la capacité nominale,
soit 60 T / j de tubercules (13 T / jour de gari).
Cette estimation ne semble cependant pas s'appuyer sur un réel
calcul du seuil de rentabilité des installations.
Les prix de vente au public, tels qu'ils nous ont été
indiqués, sont les suivants :
-
gari : 3 000 FCFA le sac de 25 Kg (120 FCFA / Kg, ce qui correspond
à un gari de qualité ordinaire)
-
farine composée : 2 750 FCFA le sac de 20 Kg (137,5 FCFA/Kg) ; ce
prix est particulièrement bas (?), comparé aux prix relevés
dans les super)-marchés de Cotonou (cf annexe 4.3)
-
Fufu (lafu) : 3 500 FCFA le sac de 25 Kg (140 FCFA / Kg)
Toute la production est vendue ; elle ne suffit pas à satisfaire
la demande.
Les racines de manioc proviendraient intégralement de
la ferme (plantation) de l'entreprise (cf § 3.2.1 ci-dessus) ; le
manioc est comptabilisé au crédit de la plantation sur la
base de 6000 FCFA / T (chiffre indiqué par la Direction de l'entreprise
; cependant, il ne correspond pas à la réalité économique
?)
Or, le tonnage de manioc nécessaire pour la fabrication de 1350
T de gari par an est de 6200 T, soit, pour le rendement annoncé
de 20 T/ha, une surface emblavée de 310 ha.
Cependant, d'après nos entretiens avec le responsable de la plantation,
seuls 240 ha de manioc étaient emblavés jusqu'en 96, 100
ha en 97 ; les chiffres qui nous ont été indiqués
ne sont donc pas concordants (?).
Il faut en déduire que, soit la production annuelle a été
inférieure à 1350 T de gari, soit des tubercules ont
été achetés à des petits producteurs.
En conclusion :
-
les installations sont largement sous-utilisées ; il serait
intéressant de vérifier si la raison en est uniquement les
problèmes d'approvisionnement de l'unité en tubercules de
manioc,
-
le système mécanisé de "garification" est
le seul rencontré au cours de la mission au Bénin et au Ghana
qui donnerait satisfaction au plan de la qualité (obtention
d'un gari de qualité après cuisson et grillage mécanique),
malgré le handicap d'une très grande consommation de KWh
et d'une très faible productivité ; il serait nécessaire
de pouvoir assister à la production d'une fournée et de constater
les paramètres de fonctionnement ainsi que la qualité du
produit obtenu, en particulier au niveau du goût du gari ,
-
l'entretien et la remise en état d'une partie des équipements
estnécessaire si l'unité veut produire au-delà
de son niveau actuel d'utilisation (5T/j) ; dans ce cas, la capacité
des postes pressage et rôtissage (cuisson) devra être augmentée
en conséquence (cf ci-dessus calculs théoriques des capacités,
calculs à valider),
-
il serait intéressant de déterminer précisément,
conjointement avec le Directeur financier de l'entreprise, le seuil
de rentabilité de l'unité gari.
B2. Unité de production de Madame Juliette O'Gbonnikan (gérante)
Une petite unité de production semi-industrielle
a été réalisée en 1990 sur la ferme achetée
par le mari de Madame Juliette O'Gbonnikan pour transformer le manioc de
la plantation en gari de 1ère qualité, intégralement
vendu au centre universitaire de l'Université Nationale du Bénin
à Calavi (Cotonou) sur la base de 190 FCFA / Kg, convenu par contrat
(client unique).
L'installation, à l'arrêt depuis Août 1993 (cf encadré),
n'a pas pu être visitée au cours de la mission, la piste d'accès
étant impraticable (fin de la saison des pluies). |
|
Unité de fabrication de gari gérée
par Madame O'Gbonnikan :
1ère récolte (campagne 1991 - 1992) : production faible
du fait d'intempéries ; fabrication et vente de 6 T de gari
2ème récolte (campagne 1992 - 1993) :
5ha x 9 T / ha = 45 T ; fabrication et vente de 12 T de gari
Activité déficitaire :
-
prix de vente négocié : 190 FCFA / Kg
-
prix de revient (coûts directs uniquement) : 200 FCFA / Kg (*)
Août 1993 : décision du mari de Madame O'Gbonnikan d'arrêter
l'activité de la ferme et de l'unité de transformation.
(*) : les éléments de coûts directs communiqués
par Madame O'Gbonnikan corespondent à un prix de revient direct
de 120 FCFA / Kg (?) ; ce point nécessiterait d'être revu
avec l'ancienne gérante de l'unité. |
L'équipement de l'unité, acheté en 1990, comprenait:
-
2 râpeuses mécaniques au gas-oil achetées au centre
de formation technique de Mgr STERMEZ (CFTS) à Ouidah ; capacité
unitaire : 500 Kg / h,
-
4 presses : 2 presses manuelles à double vis, 1 presse manuelle
à simple vis, 1 presse de 10T hydraulique (cric à main) ;
presses fabriquées par un forgeron de Godomè (Cotonou),
-
atelier cuisson : 12 foyers améliorés alimentés en
bois.
Tout le personnel était rémunéré à la
journée (travaux dans la plantation par les hommes, épluchage
par les femmes) ou à la tâche (cuisson par les femmes).
Les causes de l'échec sont analysées par madame O'Gbonnikan
de la façon suivante :
-
toute la main-d'oeuvre était salariée (sauf encadrement par
Madame O'Gbonnikan elle-même) : trop chère et difficile à
trouver,
-
le seuil de rentabilité n'a pas pu être atteint (le niveau
de ce seuil n'a pas été précisé par notre interlocutrice
?),
-
du fait des pertes cumulées, le mari de Madame O'Gbonnikan (propriétaire
des installations) a abandonné l'activité.
C. Comparaison des temps de transformation et des rendements des systèmes
traditionnel et semi-industriel
Temps de transformation de 100 Kg de manioc en gari : les temps
nécessaires pour chacune des opérations, manuellement et
au moyen d'équipements mécanisés, ont été
estimés par le Professeur NAGO, Enseignant Chercheur à la
Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université Nationale
du Bénin (cf annexe 7.1).
Ces mêmes calculs indiquent des rendements similaires pour le
système traditionnel (21 Kg de gari pour 100 Kg de racines)
et pour le système semi-mécanisé (22 Kg).
Les rendements techniques en gari ordinaire, en tapioca
et en gari enrichis ont été également établis
par M. EGOUNLETY (cf annexe 7.2).
3.4.3. La commercialisation
Le manioc est commercialisé essentiellement sous forme de gari.
Les circuits de commercialisation du gari sont représentés
sur la carte en annexe 8.1 (extrait du rapport FAO dèjà cité
- note 1) ; 66% du manioc produit (soit 1,4 T x 66% = 900 000 T) serait
commercialisé et 20% du manioc commercialisé (soit 180 000
T) se dirigerait vers les centres urbains.
Une autre source d'information indique que 35 à 40 000 T de gari
(correspondant à 140 000 à 160 000 T de manioc) alimentent
les différents circuits de commercialisation.
Quelques marchés sont cités par le LARES comme étant
réputés pour la commercialisation du gari ; il s'agit
des marchés suivants :
- dans les zones de production (marchés de collecte et de
regroupement) :
-
Glazoué
-
Savalou, connu pour son gari de 1ère qualité
-
Savè (Ouessé)
-
Tchaourou (Parakou)
-
Pobè (Ikpinle)
- à proximité des grands centres urbains (marchés
de consommation) :
-
Parakou
-
Djougou
-
Bohicon
-
Dassa (Gangbété)
-
Comé (avec également le gari en provenance du Togo)
-
Azowlisse (au Nord de Porto-novo)
-
Cotonou
- à proximité des frontières (marchés de
transit trans-frontalier) :
-
Malanville (vers le Niger)
-
Dassila (vers le Togo)
-
Sakété et Ifangni, près de Porto-Novo (vers le Nigéria)
Du fait de la réputation de qualité du gari béninois,
colporté par les béninois qui ont immigré dans les
pays de la région, les exportations, informelles, vers les
pays limitrophes sont importantes.
Le LARES a pu établir des ordres de grandeur des tonnages correspondants,
à partir d'enquêtes sur les marchés de transit dans
les pays concernés :
-
Niger : 15 000 T / an dans les années 85 - 90 ; a sensiblement diminué
depuis 1990.
-
Nigéria : 25 000 T / an en 78 - 82 ; arrêt en 1984 (fermeture
des frontières) ; reprise en 86 ; cependant la demande a fortement
diminué, du fait de la dévaluation du Naira.
A noter également les exportations officielles vers le Cameroun,
le Gabon et le Congo, par le port de Cotonou ; la pointe en 1994 (1 221
Tonnes) a déclenché l'interdiction par le Gouvernement béninois
d'exporter le gari, par crainte de pénurie sur le marché
national, ce qui explique les chiffres bas de 1995 et 1996 (cf annexe 8.2)
; il existe cependant un marché potentiel important vers ces destinations.
Les circuits de distribution font intervenir un trop grand nombre d'intermédiaires,
réduisant nécessairement la marge au niveau des transformateurs
(cf tableau 11 du rapport du GERAM en annexe 3, page 16).
Les groupements de femmes rencontrés indiquent que, faute de
moyen de transport, elles doivent souvent confier leur production à
des collecteurs qui se rendent sur des marchés plus ou moins éloignés
; le prix de vente est alors fixé par le collecteur en fonction
du "prix du marché" ; il est ensuite la base, a posteriori, de la
rémunération des transformatrices par les collecteurs, à
leur retour ; cette méthode manque de transparence et pénalise
les GF.
Un circuit de commercialisation plus court, mieux organisé
et comportant des garanties de rémunération pour les GF permettrait
une plus juste rémunération de la transformation.
3.5. Evaluation technico-économique et approche des coûts de production
3.5.1. Transformation du manioc en gari et farines
A. Filière traditionnelle
L'approche des coûts de production au niveau individuel et des
GF met en évidence que l'activité n'est rentable (faiblement)
qu'à la condition que certaines opérations réalisées
par la main-d'oeuvre familiale ne soient pas rémunérées
(cf rapport du GERAM en annexe 3, page 13).
Ce constat provient des conditions actuelles du marché (niveaux
très bas des prix du gari
du fait d'une offre importante)
et de la très faible productivité de cette activité
(travail manuel, quasi-absence de mécanisation) ; les opératrices,
individuelles ou en Groupement, interviennent sur ce marché dans
une logique de survie plus que dans une logique de rentabilité économique
qui voudrait que le temps de travail soit valorisé.
Cependant, le bilan de l'activité du GF Wadokpo mérite
d'être cité ; l'activité manioc de ce GF, rencontré
au cours de la mission, dégage, au cours de l'exercice 96, un bénéfice
(cf annexe 10).
La marge bénéficiaire (150 780 FCFA soit 94 FCFA / Kg
de gari vendu ou 91 FCFA / Kg de gari fabriqué - compte-tenu
du tiers de la production auto-consommé) est nettement supérieur
à celle estimée par le GERAM (14,9 FCFA / Kg suivant tableau
6 en annexe 3, page 13) ; ceci est dû à la vente de quantités
significatives de gari amélioré, à un prix
élevé (400 FCFA/Kg).
Le GF reçoit un appui technique de l'ONG APEIF pour cette activité
; APEIF réalise à Cotonou un contrôle de la qualité
et assure la commercialisation.
Il est intéressant de constater que ce GF a su rentabiliser son
activité manioc en développant un produit à forte
valeur ajoutée.
On peut en conclure que, du fait d'un niveau de prix bas du gari
en vrac, même pour du gari de 1er choix (sauf exeption
comme le gari de Savalou), la rentabilité de l'activité
doit être recherchée par une production à plus forte
valeur ajoutée (conditionnement en sachet, ajout d'ingrédients
pour l'"amélioration" des qualités nutritives et gustatives
du gari), permettant de commercialiser ces produits à une
clientèle urbaine plus aisée.
Le scénario de développement proposé au §
6.1 ci-après est établi sur de telles hypothèses.
B. Unités semi-industrielles (entreprises intermédiaires)
Seule l'expérience de l'unité de Madame O'Gbonnikan a
pu être analysée au cours de la mission au Bénin ;
cette expérience, trop courte, est arrêtée aujourd'hui.
On ne peut donc pas en tirer de réelle conclusion.
Par contre, les expériences au Ghana de petites unités
semi-industrielles transformatrices de manioc en gari (ESTA QUALITY
FOODS Ltd) et en farines (ELSA FOOD) doivent pouvoir être reproduites
au Bénin, sous réserve de vérifier les spécificités
du marché urbain dans le pays, pour ces produits "haut de gamme".
Le scénario de développement de la filière par
des investissements dans des petites unités semi-industrielles est
proposé dans ce sens au § 6.2 ci-après.
C. Unités industrielles
Les informations chiffrées recueillies, au cours de la mission,
auprès de l'entreprise ADEOSSI ne permettent pas de se prononcer
sur la rentabilité de cette unité
gari.
Dans le contexte des prix du marché béninois, il est probable
que ce type d'unité ne peut pas trouver son seuil de rentabilité
en se limitant à la seule production de gari.
3.5.2. Production de cossettes de manioc en tant que PSC
L' étude réalisée pour le compte de la FAO ainsi
que les estimations du GERAM (cf annexe 3 page 13) mettent en évidence
une marge bénéficiaire pour le producteur.
Le problème majeur pour le développement de ce débouché
(PSC) à l'échelle industrielle réside dans la non-organisation
de l'ensemble de la filière. L'expérience de la SOBBECA est
instructive, à ce sujet : la société a réalisé
des pertes financières importantes en 96 et 97, du fait du coût
élevé de la mise en place de la logistique nécessaire
pour assurer l’approvisionnement en cossettes et de l’absence de subventions
pour faire face à cette action de structuration de la filière
; cette situation est à l'origine de la décision d'arrêter
les activités fin 97, aux dires du Gérant de la SOBBECA rencontré
le 10/12/97 à Cotonou.