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Afrique de l'Ouest
Les régions tropicales semi-arides d'Afrique de l'Ouest sont définies comme celles où les précipitations dépassent l'évapotranspiration potentielle de deux à sept mois par an. Cette région comprend la totalité du Sénégal, la Gambie, le Burkina Faso, le Cap-Vert, d'importantes fractions méridionales de la Mauritanie, du Mali et du Niger, ainsi que les parties nord de la Côte d'Ivoire, du Ghana, du Togo, du Bénin et du Nigéria. Les céréales occupent près de 70 pour cent de la superficie totale cultivée dans cette région et emploient de 50 à 80 pour cent du total des ressources des exploitations agricoles (Matlon, 1990). Les mils et le sorgho représentent 80 pour cent de la production de céréales. Au cours des 25 dernières années, la progression de leur production a été lente et inférieure d'environ 1 pour cent à la croissance démographique annuelle. Le rendement moyen par unité de superficie du mil et du sorgho a diminué pendant cette période, et les légères augmentations de production ont essentiellement été dues à I'expansion de la superficie cultivée. De nombreux facteurs ont contribué à faire décroître la productivité, notamment la pression démographique et la dégradation de l'environnement.
Les régions tropicales semi-arides d'Afrique de l'Ouest peuvent se classer en quatre zones agroclimatiques: le Sahel (précipitations annuelles <350 mm), la région soudano-sahélienne (de 350 à 600 mm), la région soudanaise (de 600 à 800 mm) et la région soudano-guinéenne (de 800 à 1100 mm). Selon Matlon (1990), un potentiel d'accroissement important de l'offre de sorgho et de mil n'existe que dans la zone soudano-guinéenne et dans une moindre mesure dans la zone soudanaise. Il importerait de donner la plus haute priorité à la stabilisation des rendements et aux technologies de conservation des terres dans ces deux zones.
Reardon et Matlon (1989) ont décrit les modes de consommation alimentaire de la population de deux villages, qui représentaient l'un la savane sahélienne et l'autre la zone soudano-sahélienne. La dépendance par rapport au marché était nettement plus faible parmi les ménages du village soudano-sahélien et plus également répartie à travers les couches de revenu que dans le village sahélien. Les pauvres étaient particulièrement vulnérables pendant la saison des pluies, où ils dépendaient davantage du marché. En effet, les produits alimentaires achetés apportaient 60 à 70 pour cent du total des calories consommées par les ménages pauvres et à revenu intermédiaire au cours de la saison des pluies. Dans le village sahélien, le sorgho blanc ne représentait que 4 pour cent de la superficie cultivée mais apportait près de 25 pour cent des calories consommées en dehors de la saison des moissons par les ménages pauvres. Le sorgho rouge et le maïs ne représentaient que 10 pour cent de la superficie cultivée, mais fournissaient jusqu'à 60 pour cent des calories consommées par les pauvres pendant les saisons autres que celle des récoltes.
Le tableau 11 indique les dépenses des ménages consacrées à diverses céréales (représentées par les parts des dépenses monétaires totales) au Burkina Faso, en Gambie, au Mali, au Niger et au Sénégal (Reardon, 1993). Ces données proviennent d'enquêtes menées au cours d'années où la récolte était bonne et d'autres où elle était mauvaise. Elles montrent que le riz est un élément important dans les régimes alimentaires urbains au Sahel. Cela s'explique peut-être par le coût relativement bas du riz importé dû au recul de la production de céréales secondaires et par le fait que les consommateurs souhaitent imiter les habitudes alimentaires des groupes à haut revenu et des Occidentaux. D'autre part, la transformation relativement plus facile et le temps de cuisson plus rapide du riz, ainsi que la disponibilité d'aliments tout prêts à base de riz vendus par les vendeurs de rue, sont d'autres raisons qui ont influencé la consommation de cette denrée. En général, la part conjuguée du mil et du sorgho dépasse celle du maïs. dans les régimes alimentaires urbains du Sahel. Dans les régimes alimentaires ruraux, les céréales secondaires dominent, sauf dans quelques cas isolés. Cependant, les aliments achetés constituent une part non négligeable de ces régimes.
Il est urgent d'élaborer des méthodes adaptées de transformation et de mouture du sorgho et du mil. La mise au point de produits nouveaux prêts à être consommés à base de ces céréales, qui puissent être vendus sur les marchés et par les vendeurs de rue, ouvrirait de nouvelles voies d'utilisation et pourrait réduire la dépendance vis-à-vis du riz importé.
TABLEAU 11 - Consommation céréalière au Sahel: résultats d'enquêtesa
Echantillon de population | Riz | Mil | Sorgho | Maïs | Blé | Autres | Total |
BURKINA FASO | |||||||
Ouagadougou (1984/85) | |||||||
Echantillon global | 41 | 16 | 12 | 15 | 17 | -b | 100 |
Tiers le plus pauvre | 45 | 17 | 15 | 15 | 9 | - | 100 |
Tiers le plus riche | 35 | 13 | 8 | 12 | 32 | - | 100 |
Ouagadougou (1982/83) | |||||||
Echantillon global | 52 | 6 | 31 | 4 | 7 | - | 100 |
Tiers le plus pauvre | 55 | a | 33 | 1 | 3 | - | 100 |
Tiers le plus riche | 52 | 3 | 20 | 5 | 20 | - | 100 |
Zones rurales (1984/85) | |||||||
Zone sahélienne | 1 | 47 | 29 | 21 | 1 | - | 100 |
Zone soudanienne | 0 | 11 | 72 | 16 | 1 | - | 100 |
Zone guinéenne | 6 | 22 | 57 | 14 | 1 | - | 100 |
GAMBIE | |||||||
Zones rurales (1985/86) | |||||||
Echantillon global | 75 | 23c | 3 | - | - | 100 | |
MALI | |||||||
Bamako (1985/86) | |||||||
Echantillon global | 57 | 19 | <0,5 | 1 | 17 | 6 | 100 |
Quartile le plus pauvre | 55 | 20 | 1 | <0,5 | 16 | 8 | 100 |
Quartile le plus riche | 54 | 21 | 1 | 0 | 19 | 5 | 100 |
Autres villes (1985/86) | |||||||
Echantillon global | 54 | 21 | 1 | 0 | 19 | 5 | 100 |
Zones rurales | |||||||
Bougouni | 8 | 83c | 6 | - | 3 | 100 | |
Kayes | 4 | 21c | 74 | - | 1 | 100 | |
NIGER | |||||||
Niamey (1988/89)d | |||||||
Echantillon global | 55 | 36 | 2 | 16 | <0,5 | - | 100 |
Zones rurales (1988/89) | |||||||
Tillabery | 17 | 70 | 15 | <0,5 | <0,5 | - | 100 |
Diffa | 1 | 53 | 16 | 24 | 5 | - | 100 |
SÉNÉGAL | |||||||
Dakar (1983) | |||||||
Echantillon global | 66 | 31 | - | 3 | - | - | 100 |
Autres zones urbaines | |||||||
Dioubel | 37 | 48c | <0.8 | 13 | - | 100 | |
Zones rurales | |||||||
Casamance centrale | 87 | 8c | 5 | <0,5 | - | 100 | |
Kaolack rural | 11 | 78c | 8 | 3 | - | 100 | |
Zone sahélienne | 48 | 26 | 0 | 4 | <0,5 | - | 100 |
Zone soudanienne | 15 | 74 | <0,5 | <0,5 | <0,5 | - | 100 |
a Ce tableau présente les dépenses ou parts du budget qui
sont les parts en produits du total des dépenses monétaires
(somme de la valeur imputée de la consommation propre plus
transferts plus achats).
b -: données non signalées.
c Mil et sorgho signalés ensemble.
d Chiffres donnés uniquement en parts du budget céréalier en
termes physiques.
Source: Reardon, 1993.
Afrique orientale et australe
Le sorgho et le mil représentent 23 pour cent de la production céréalière des pays de la Communauté du développement de l'Afrique australe (SADC), qui comprennent l'Angola, le Botswana, le Lesotho, le Malawi, le Mozambique, la Namibie, la République-Unie de Tanzanie, le Swaziland, la Zambie et le Zimbabwe. Cependant, ils ne constituent des cultures céréalières dominantes que dans deux pays, le Botswana et la Namibie (respectivement, 86 et 50 pour cent de la production totale de céréales). Le sorgho et le mil sont importants dans les régions qui reçoivent moins de 650 mm de précipitations par an. La productivité de ces céréales est faible, et dans la plupart des pays de la SADC il n'existe pas de stratégie de développement des soussecteurs du sorgho et du mil.
Dans la majorité de ces pays, les marchés du secteur structuré (réglementé par l'État) ne voient passer qu'une très faible proportion de la production totale de sorgho et de mil (tableau 12). Ils représentent moins de 10 pour cent de la production totale au Lesotho au Swaziland, en République-Unie de Tanzanie, en Zambie et au Zimbabwe. La plus grande partie du sorgho et du mil produits dans la région de la SADC est consommée par les ménages producteurs ou vendue sur les marchés traditionnels, essentiellement pour la production de bière. Le prix du maïs est plus faible que celui du sorgho sur de nombreux marchés traditionnels à travers la région de la SADC, et il pourrait exister un bon potentiel d'expansion de la production de sorgho et de mil, compte tenu des différences de prix.
L'une des raisons qui explique le non-accroissement de la production de sorgho et de mil est que la productivité de ces cultures est faible. Les rendements moyens sont inférieurs à celui du maïs. même dans les régions semi-arides de la SADC. D'autre part, bien que le coût total de la production soit souvent plus bas que celui du maïs la productivité des céréales à petits grains, mesurée en termes de rentabilité de la main-d'uvre, tend à être faible. On dit que, dans certaines conditions, I'éleusine cultivée offre une rentabilité plus élevée que le maïs (tableau 13). Or, elle exige plus de main-d'uvre, ce qui limite sa production (Rohrbach, 1991).
Pour rendre le sorgho et le mil compétitifs, il est donc nécessaire d'améliorer la productivité tout en garantissant la qualité du grain. La superficie cultivée en sorgho et en mil n'augmentera pas sensiblement si leur productivité n'est pas nettement améliorée. Il est donc urgent d'améliorer les technologies de production de ces céréales et de diffuser les connaissances nécessaires aux exploitants agricoles. C'est la seule façon de permettre à ces céréales de concurrencer le maïs dans les conditions locales. L'identification de quelques domaines bien étudiés pour l'application du sorgho à d'autres usages ouvrirait de nouvelles voies à un accroissement de son utilisation et inciterait à améliorer la production et la productivité.
Inde
L'Inde est le deuxième producteur de sorgho au monde. A l'heure actuelle, l'essentiel du sorgho produit en Inde sert pour l'alimentation humaine, sous forme de roti ou chapatti (galette de pain sans levain). Walker (1990) a analysé les perspectives de l'offre et de la demande de sorgho en Inde. Il a constaté qu'au cours des trois dernières décennies la consommation moyenne de sorgho par habitant avait nettement baissé aussi bien parmi les ménages ruraux que parmi les ménages urbains. La consommation rurale moyenne est tombée de 1,74 à 1 kg par habitant et par mois. La consommation urbaine est descendue de 0,74 à 0,46 kg par habitant et par mois. Selon les projections, la consommation de sorgho devrait continuer à diminuer d'environ 0,5 pour cent par an. La tendance à la baisse de la consommation de sorgho est due en partie à la diminution de la consommation par habitant de l'ensemble des céréales.
On a remarqué que la diminution de la consommation de sorgho était proportionnelle à l'augmentation des dépenses. L'augmentation des revenus s'accompagne d'une augmentation de consommation de blé et de riz dont les produits sont faciles à préparer et se gardent mieux. Il y a aussi, avec l'augmentation des revenus et l'urbanisation, une tendance à consommer une plus grande variété d'aliments. Le prix du sorgho par rapport à celui du blé et du riz n'a pas augmenté dans les principales régions consommatrices de sorgho. Autrement dit, les autres facteurs ont probablement plus d'influence que le prix lui-même pour expliquer la chute de la consommation de sorgho par habitant. Les perspectives de changement technologique modifieraient peut-être le scénario pour améliorer la production et l'utilisation du sorgho.
Chine
La Chine est le quatrième producteur de sorgho dans le monde et le deuxième en Asie, immédiatement après l'Inde, en ce qui concerne la superficie et la production. Environ 30 pour cent du sorgho produit sont utilisés pour l'alimentation humaine et 60 pour cent pour la consommation animale et la fabrication de boissons alcooliques (Kelley, Parthasarathy Rao et Singh, 1992). L'importance du sorgho en tant qu'aliment humain a cependant diminué avec le temps. D'autre part, la superficie qui lui est consacrée est passée de 2,8 millions d'ha en 1979-1981 à 1,9 million d'ha seulement en 1990. En conséquence, la production a baissé, passant de 7 millions de tonnes en 19791981 à 5,3 millions de tonnes en 1990. Ces dernières années, on a attaché plus d'attention au sorgho en tant que fourrage et à la mise au point de cultivars convenant à cet usage.
TABLEAU 12 - Production de céréales secondaires vendue à travers les circuits structurés de commercialisation dans les pays de la SADC (pourcentage)
Pays | Sorgho | Milchandelle | Eleusine | Maïs. |
Zimbabwe (1989/90) | 8 | 9 | 3 | 62 |
Tanzanie (1986/87) | 1a | 7 | ||
Zambie (1987188) | 1 | 1 | 1 | 69 |
Botswana (1985) | 25 | 62 | ||
Lesotho (1989) | 1 | |||
Swaziland (1990) | 1 |
a Sorgho et mils conjugués.
Source: rohrbach, 1991.
TABLEAU 13 - Rentabilité par heure de main-d'uvre au Zimbabwe pendant la campagne 1988/89a
Secteur/culture | Total de la main-d'vre (heures) | Rendement moyen (t/ha) | Prix moyen ($Z/kg) | Marge brute ($Z/ha) | Rentabilité par heure de travail ($Z/ha) |
Secteur des petites exploitations | |||||
Maïs | 411 | 1,76 | 0,23 | 233,36 | 0,59 |
Mil chandelle | 521 | 0,38 | 0,34 | 30,95 | 0,06 |
Eleusine | 545 | 0,45 | 0,61 | 173,81 | 0,38 |
Sorgho | 308 | 0,32 | 0,42 | 54,43 | 0,16 |
Nyajena | |||||
Maïs | 360 | 0,44 | 0,30 | 46,71 | 0,13 |
Mil chandelle | 551 | 0,27 | 0,45 | 35,31 | 0,07 |
Eleusine | 567 | 0,38 | 0,68 | 175,37 | 0,40 |
Sorgho | 398 | 0,24 | 0,36 | 32,44 | 0,08 |
a Précipitations favorables dans les zones où Ies précipitations moyennes sont plus élevées: précipitations médiocres au Nyajena.
Source:: Rohrbach, 1991 .
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