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Lorsque le sorgho ou les mils sont stockés dans des pays en développement, ils le sont généralement en petites quantités dans des conteneurs traditionnels, souvent dans l'exploitation même. Il est rare qu'on accumule de grandes quantités, et le stockage en vrac est peu courant.
La transformation implique la séparation partielle et/ou la modification des trois constituants principaux de la graine de céréale - le germe, l'endosperme et le péricarpe. Diverses méthodes traditionnelles de traitement sont encore largement utilisées, surtout dans les régions des tropiques semi-arides où le sorgho et les mils sont surtout cultivés pour la consommation humaine. La plupart des techniques traditionnelles de traitement sont laborieuses, monotones et appliquées à la main. Elles sont presque toujours confiées aux femmes. Dans une certaine mesure, les méthodes utilisées ont été mises au point de façon à fabriquer des aliments traditionnels répondant aux goûts locaux. Les techniques traditionnelles couramment utilisées comprennent le décorticage (généralement par pilage suivi de vannage et parfois de tamisage), le maltage, la fermentation, le rôtissage, le floconnage et le broyage. Ces méthodes impliquent essentiellement de la main-d'uvre et donnent un produit de qualité médiocre. Le sorgho et les mils seraient probablement plus utilisés si l'on améliorait le traitement et si l'on pouvait fournir pour répondre à la demande une farine de qualité suffisante (Eastman, 1980).
D'une façon générale, les méthodes industrielles de transformation du sorgho et des mils ne sont pas aussi développées que celles que l'on utilise pour le blé et le riz, qui sont presque partout beaucoup plus estimés que le sorgho et les mils. Le potentiel de traitement industriel du sorgho et des mils est bon, et des tentatives ont été faites dans plusieurs pays pour mettre au point des techniques industrielles améliorées. La mouture à la demande a eu un impact non négligeable dans plusieurs pays d'Afrique où elle a été récemment introduite. Rien qu'au Nigéria, où 80 pour cent environ du sorgho et des mils sont maintenant moulus à la commande en farine complète, plus de 2,5 millions de tonnes de sorgho ont été traitées de cette façon (Ngoddy, 1989).
Dans une certaine mesure, pour le stockage du sorgho mais surtout pour son traitement, beaucoup dépend du type de sorgho: brun, blanc ou jaune. L'apparence extérieure n'indique pas le type de variété. Les trois types peuvent avoir une apparence blanche, jaune, brune, rouge ou pourpre, bien que les sorghos bruns aient généralement des enveloppes plus sombres que les sorghos jaunes et blancs. (Plus loin dans ce chapitre, on utilisera le terme «blanc» qui est le plus généralement adopté pour désigner à la fois les types blancs et jaunes.) L'important c'est de savoir s'il y a un testa. Le testa est généralement rouge brique, et même s'il ne reste dans une farine qu'une faible quantité de testa rouge, cela lui donnera une couleur rose mal acceptée par beaucoup de gens. Si la variété contient du tanin, c'est dans le testa qu'on en trouvera la plus grande partie. Le tanin est mal accepté pour deux raisons: il concurrence la protéine disponible et il a un goût amer. Cependant, ce goût présente un grand avantage car c'est probablement cette amertume qui fait que les oiseaux granivores n'aiment pas les sorghos à teneur élevée en tanin, de sorte que les agriculteurs les cultivent en abondance là où les oiseaux causent de graves dégâts au sorgho blanc.
La présence d'un testa est déterminée par deux gènes dominants, B1 et B2 (Hulse, Laing et Pearson, 1980). Le sorgho sauvage contient généralement certains de ces gènes dominants, de sorte que la pollinisation ouverte des hybrides blancs tendra à les faire dégénérer en variétés brunes. Les replantations répétées de graines récoltées s'accompagnent souvent d'un plus grand nombre de graines comportant un testa. Ces graines sont beaucoup plus difficiles à moudre que celles qui n'en ont pas.
Les sorghos bruns tendent à être plus tendres que le sorgho blanc et sont plus vulnérables aux dégâts causés par les insectes lors du stockage que les sorghos blancs. Ils sont en revanche nettement moins vulnérables aux attaques de champignons avant la récolte et pendant le stockage.
C'est pour le traitement que les sorghos bruns présentent le plus de difficultés, pour les raisons suivantes:
- Lorsque le péricarpe est progressivement éliminé de l'extérieur, le testa est pratiquement la dernière couche à être éliminée.
- Lorsqu'un sorgho brun a récemment été humidifié, le péricarpe tend à se séparer juste au-dessus du testa. Si le péricarpe est alors éliminé par frottement, le testa humide reste fermement attaché à l'endosperme.
- Les sorghos bruns sont souvent très tendres, et l'endosperme tend à se casser si la graine est soumise à un impact mécanique.
Le meilleur moyen de séparer le testa d'un sorgho brun de l'endosperme est de couper l'endosperme de l'intérieur du péricarpe, comme cela se produit dans la mouture par broyeur à cylindres. Cela n'est cependant pas possible avec les méthodes traditionnelles. C'est pour ces raisons qu'on n'utilise généralement les sorghos bruns que pour la production de bière, où une certaine amertume et une certaine couleur ne sont pas seulement acceptables mais souvent recherchées.
L'objectif du stockage est de préserver autant que possible la valeur de la graine pour son utilisation future prévue, autrement dit de conserver une proportion aussi élevée que possible soit de semences viables pour plantation à la saison suivante, soit de la valeur alimentaire de la graine pendant un temps aussi long que possible. Plusieurs facteurs conduisent à des pertes de viabilité et d'éléments nutritifs, mais globalement les principales causes de perte sont les déprédations causées par les ravageurs (insectes, oiseaux et rongeurs) et les dégâts dus aux moisissures. La germination de la graine entraîne aussi des pertes, mais à une moindre échelle. Les céréales sont stockées par les consommateurs et les industriels afin d'être utilisées plus tard; elles sont aussi stockées par les négociants pour la revente, généralement sur le marché intérieur mais parfois pour l'exportation.
L'humidité dans la graine et la température de stockage sont les facteurs physiques qui contribuent le plus aux pertes (FAO, 1970b). L'essentiel de l'activité qui provoque ces pertes est d'autant plus rapide que la température augmente. Lorsqu'il y a des changements même mineurs de température, l'humidité se déplace et s'accumule dans certaines zones, soit près du sommet du conteneur, soit dans des endroits qui sont plus frais que le reste.
Cela permet souvent une activité microbiologique dans des graines comparativement sèches. Cette activité produit en général de la chaleur et, dans les entrepôts non ventilés, les endroits qui sont devenus humides peuvent devenir chauds jusqu'à carbonisation. A ce stade, la graine est inutilisable. Elle peut même prendre feu lorsqu'elle est exposée à l'air.
Le remplissage des conteneurs de stockage se fait de préférence en début de journée lorsque l'air est frais et que l'humidité est souvent à son niveau le plus bas. Il convient de conditionner le grain aussi serré que possible de façon à laisser le minimum de place aux insectes pour se déplacer et se reproduire. On mélange parfois du sable avec le grain afin de réduire encore les espaces libres. Des études menées au Sénégal ont montré que lorsqu'on mélangeait du sorgho et du mil convenablement séchés et battus avec 30 pour cent de sable, les pertes en stockage étaient réduites.
Pushpamma et al. (1985) ont constaté que les pertes en stockage sur sept mois étaient plus importantes pour le sorgho que pour le mil chandelle, pour lequel elles étaient plus importantes que pour l'éleusine (tableau 14). Ils ont aussi constaté que la teneur en humidité de tous les grains stockés augmentait et que les niveaux de niacine et de protéine diminuaient (tableau 15). Rao et Vimala ( 1993) ont montré que le prétraitement du grain de sorgho à l'aide de phosphate tricalcique à 2 pour cent réduisait le rancissement pendant le stockage.
L'influence de l'humidité de la graine (humidité relative), de la température et de l'atmosphère environnante sur la germination du sorgho a été étudiée par Bass et Stanwood ( 1978). Les graines de sorgho ont été stockées dans des conteneurs en métal hermétiquement fermés dans six atmosphères différentes (air, azote, dioxyde de carbone, hélium, argon et vide), à trois niveaux différents d'humidité et cinq températures différentes, pendant une période de 16 mois. La température était le seul paramètre qui modifiait la rapidité de germination; celle-ci était au minimum à -12°C.
Les méthodes utilisées pour stocker les graines dépendent de la valeur de la denrée en question, de la quantité stockée et des conditions environnementales. Comparés à d'autres céréales, le sorgho et les mils ne font pas l'objet d'échangés importants sur le plan international, et dans les pays en développement où on les cultive pour l'alimentation humaine il y a généra lement équilibre entre la production et la demande locale. Les agriculteurs et les ménages ruraux des pays en développement stockent l'essentiel de la récolte dans de petits dépôts. Il n'y a guère de nécessité de stockage en grande quantité de ces produits.
TABLEAU 14 - Dégradation et perte de poids du sorgho et des mils conservés au niveau des ménages, en Inde
Durée du stockage | Pourcentage de dégradation |
Pourcentage de perte de poids | Augmentation d'acide urique (mg / 100g) | |
En poids | En nombre | |||
Sorgho | ||||
1 mois | 3 | 3 | 0,2 | 0,0 |
5 mois | 5 | 6 | 1,5 | 4,3 |
9 mois | 9 | 11 | 2,4 | 5,4 |
Mil chandelle | ||||
1 mois | 0 | 0 | 0,1 | 0,0 |
5 mois | 2 | 2 | 0,2 | 3,3 |
9 mois | 2 | 4 | 1,0 | 3,6 |
Eleusine | ||||
1 mois | 0 | 1 | 0,0 | 0,0 |
5 mois | 0 | 1 | 0,0 | 1,4 |
9 mois | 0 | 1 | 0,1 | 1,6 |
Source: Pushpamma et al., 1985.
Les conteneurs de stockage varient des petits conteneurs traditionnels de la ferme ou de la maison à des silos que l'on trouve parfois dans les grandes exploitations. Dans de nombreux pays, on construit de petits greniers en tressant des végétaux tels que bambou, paille, écorce et petites branches, puis on bouche les trous avec de la boue ou de la bouse. On peut les construire directement sur le sol ou les surélever sur des plates-formes ou sur pilotis.
Méthodes de stockage en Afrique
Dans certains pays d'Afrique de l'Ouest, les graines de sorgho et de mil sont mélangées à de la cendre de bois et stockées dans des pots en terre (Vogel et Graham, 1979). Au Nigéria, on stocke le sorgho et les mils à l'état d'épis non battus dans des conteneurs à parois pleines appelés rumbus. Pour le stockage de courte durée, on dispose les paquets de panicules de sorgho et d'épis de mil en couches dans ces rumbus. Pour un stockage de trois à six ans, on dispose les épis séparés et non en paquets. Certains agriculteurs étalent les feuilles de gwander daji (Anona senegalensis) sur le fond du rumbu et entre chaque couche de graines. Lorsqu'un rumbu est plein, l'orifice est fermé de façon étanche avec de l'argile.
TABLEAU 15 - Composition chimique du sorgho et des mils conservés pendant des durées différentes (hors humidité)
Durée de stockage | Nombre d'échantillons | Humidité (%) | Protéines (g) | Azote non protéique (mg ) | Thiamine (mg) | Riboflavine (mg) | Niacine (mg) |
Sorgho | |||||||
1 mois | 26 | 10,4 | 8,5 | 326 | 0,32 | 0,18 | 2,3 |
5 mois | 26 | 10,4 (0) | 8,2 (-3.5) | 240 (+1,7) | 0,31 (-3,1) | 0,16 (-11,1) | 2,1 (-8,7) |
9 mois | 22 | 11,1 (+6,7) | 7,6 (-10,6) | 246 (+4,3) | 0,24 (-25,1) | 0,16 (-11,1) | 2,0 (-13,0) |
Mil chandelle | |||||||
1 mois | 18 | 9,3 | 10,0 | 282 | 0,33 | 0,21 | 2,4 |
5 mois | 18 | 11,0 (+18,3) | 9,9 (-1,0) | 285 (+1,1) | 0,29 (-12,1) | 0,21 (0) | 2,4 (0) |
9 mois | 12 | 10,7 (+15,1) | 8,9 (-11,0) | 297 (+5,3) | 0,20 (-39,4) | 0,21 (0) | 2,0 (-16,7) |
Eleusine | |||||||
1 mois | 7 | 10,9 | 7,6 | 193 | 0,37 | 0,19 | 1,3 |
5 mois | 7 | 10,9 (0) | 7,4 (-2,6) | 216 (+12,0) | 0,33 (-10,8) | 0,18 (-5,3) | 1,3 (0) |
9 mois | 7 | 11,6 (+6,4) | 7,2 (-5.3) | 275 (+42,5) | 0,21 (-43,2) | 0,17 (-10,5) | 1,1 (-15,4) |
Note: Les chiffres entre parenthèses indiquent des
diminutions en pourcentage (-) ou des augmentations (+) par
rapport aux valeurs initiales de l'échantillon.
Source: Pushpamma ,1985.
En Ouganda, le sorgho est battu et stocké dans des sacs de jute, tandis que les mils sont stockés sans avoir été battus. Au Soudan, on utilise des dépôts souterrains consistant en puits contenant de 2 à 5 tonnes de grain.
Méthodes de stockage en Inde
La plus grande partie du sorgho et des mils cultivés dans l'Andhra Pradesh sert à la consommation des ménages. Pushpamma et Chittemma Rao ( 1981 ) ont décrit les diverses façons dont ces céréales sont stockées dans cette région. Cela se fait parfois sur le sol, généralement en entassant les épis (à l'intérieur ou à I'extérieur) et en les couvrant avec de la paille. A mesure que l'on a besoin de grains, les épis sont retirés et battus. Plus souvent, le stockage se fait dans des sacs de jute, qui sont empilés soit sur le sol soit sur des plates-formes en bois surélevées. On utilise aussi des puits souterrains, qui peuvent être situés sous la maison ou à l'extérieur. Les parois du puits sont revêtues de paille de paddy ou de sorgho. Lorsque le puits est plein, le grain est couvert avec de la paille et de la terre. Pour un stockage de plus longue durée, on couvre le sommet avec de la boue. Les jarres, silos et conteneurs de stockage sont fabriqués à partir d'un certain nombre de matériaux différents. A petite échelle, le grain est stocké dans des pots en argile. Les conteneurs plus importants sont faits de bois, de briques ou de pierres ou consistent en un panier qui est ensuite fermé hermétiquement à l'aide d'argile ou de bouse. Lorsque ces conteneurs restent à l'intérieur, on les laisse parfois découverts, mais lorsqu'on les conserve à l'extérieur on les couvre soit avec un couvercle, soit avec un toit de chaume. Si le grain doit être stocké pendant longtemps, on recouvre le sommet du conteneur avec de la boue ou de la bouse. Une exposition occasionnelle au soleil est la mesure la plus généralement utilisée pour empêcher l'infestation par les insectes.
Stockage de la farine
La farine est généralement fabriquée au fur et à mesure des besoins. Il n'est pas courant qu'on la stocke pendant de longues périodes car elle a tendance à devenir rance. C'est particulièrement le cas pour la farine de mil chandelle en raison de sa très forte teneur en matière grasse. Il vaut donc mieux stocker le sorgho et les mils, en particulier le mil chandelle, sous forme de graines entières.
Transformation des graines non traitées
La farine produite par mouture de la graine complète est parfois utilisée, surtout lorsqu'il s'agit de petits mils, mais dans la plupart des régions où l'on consomme le sorgho et les mils, la graine est partiellement divisée en ses constituants avant d'être utilisée pour confectionner des aliments.
Le premier objectif de la transformation est généralement d'éliminer une partie du son qui constitue les couches extérieures fibreuses de la graine. Cela se fait généralement en pilant puis en vannant ou en tamisant. La graine peut tout d'abord être humidifiée par addition d'environ 10 pour cent d'eau ou par trempage toute la nuit. Lorsqu'on pile les graines dures, I'endosperme reste relativement intact et peut être séparé des gros gruaux par vannage. Avec les graines tendres, I'endosperme se défait en petites particules et le péricarpe peut être séparé par vannage et tamisage.
Lorsqu'on pile du grain convenablement préparé, la fraction son contient l'essentiel du péricarpe ainsi qu'une partie du germe et de l'endosperme. Cette fraction est généralement utilisée pour l'alimentation des animaux domestiques. L'autre fraction, qui contient l'essentiel de l'endosperme et une grande partie du germe ainsi qu'une partie du péricarpe, est conservée pour la consommation humaine.
La conservation du germe dans la farine améliore certains aspects de la qualité nutritionnelle, mais en même temps elle accélère le rancissement. C'est particulièrement important dans le cas du mil chandelle. Le grain sec, humidifié ou mouillé est normalement pilé à l'aide d'un pilon en bois dans un mortier en bois ou en pierre. L'addition d'environ 10 pour cent d'eau facilite non seulement l'élimination du son fibreux, mais aussi la séparation du germe et de l'endosperme, si on le souhaite. Bien que l'on obtienne une farine légèrement humide, la plupart des gens font tremper le grain de cette façon avant de le piler. Le pilage de grain humide ou sec à la main est très laborieux, extrêmement long et inefficace. Une femme qui travaille dur avec un pilon et un mortier peut, dans le meilleur des cas, décortiquer seulement 1,5 kg à l'heure (Perten, 1983). Le pilage ne donne pas un produit uniforme, et ce dernier se garde mal. De nombreux grains de mil chandelle présentent une dentelure irrégulière dans le péricarpe, ce qui fait qu'il est plus difficile de les décortiquer que pour la plupart des autres céréales (Kent, 1983).
La taille des particules de la fraction endosperme peut être réduite par broyage ou mouture pour produire soit du gruau soit de la farine fine. Ce travail pénible est presque toujours fait par les femmes. Les meules traditionnelles utilisées pour le broyage de là graine complète ou décortiquée en farine sont généralement constituées d'une petite pierre que l'on tient dans la main et d'une pierre plate plus grande qui est placée sur le sol (Subramanian et Jambunatha, 1980; Vogel et Graham, 1979). Les grains, qui doivent être assez secs, sont broyés et pulvérisés par le mouvement vers l'avant et vers l'arrière de la pierre tenue à la main sur la pierre posée au sol. Ce travail est très laborieux, et il est très difficile pour quiconque de moudre plus de 2 kg de farine à l'heure. Dans un processus traditionnel utilisé dans de nombreux pays d'Afrique et d'Asie, le grain décortiqué est broyé en farine grossière, soit au mortier soit entre des pierres. Le grain est également moulu en farine grossière ou fine par des moulins à disques mécanisés que l'on trouve maintenant dans de nombreux villages.
Pour la mouture à l'état humide, le sorgho et les mils sont trempés dans l'eau toute la nuit (et parfois plus longtemps) puis écrasés à la main, souvent entre deux pierres, pour former une pâte. Le trempage rend l'endosperme très tendre et le péricarpe très dur, et il facilite le broyage, mais au lieu d'obtenir une farine on obtient une pâte.
Transformation des grains maltés
Le maltage implique de faire germer le grain avec apparition d'une pousse. En général, le grain est trempé pendant 16 à 24 heures, ce qui lui permet d'absorber suffisamment d'humidité pour germer et pour que des pousses apparaissent. Cependant, les radicelles et les pousses du sorgho germé contiennent de très grandes quantités de dhurrine, glucoside cyanogène, qui à l'hydrolyse produit une toxine puissante connue sous différents noms: acide prussique, acide cyanhydrique (HCN) et cyanure (Panasiuk et Bills, 1 9X4). Les jeunes pousses et radicelles du sorgho germé et leurs extraits ne doivent donc jamais être consommées, que ce soit par des personnes ou par des animaux, si ce n'est en quantité minime (par exemple lorsqu'on utilise le grain germé uniquement comme source d'enzymes). Dada et Dendy (1988) ont montré que l'élimination des pousses et des radicelles et la transformation ultérieure réduisaient la teneur en HCN de plus de 90 pour cent.
Le sorgho malté est traditionnellement utilisé dans plusieurs pays d'Afrique, mais toujours après élimination soigneuse des parties toxiques. L'hullu-murr est un aliment traditionnel important préparé au Soudan à partir de sorgho malté (Bureng, Badi et Monowar, 1987). Au Kenya, on prépare avec du sorgho et du mil germés des boissons alcooliques et des bouillies.
Au cours du processus de germination, le grain produit de l'alpha-amylase, une enzyme qui convertit l'amidon insoluble en sucres solubles. Cela a pour effet d'alléger la pâte produite en chauffant une bouillie d'amidon dans l'eau, ce qui à son tour permet une plus grande densité calorifique dans une pâte d'une viscosité donnée (on peut utiliser jusqu'à trois fois plus de farine quand le grain a été germé). L'énergie que les jeunes enfants peuvent consommer est souvent limité parle volume qu'ils peuvent absorber. En utilisant le grain germé, on peut rendre les aliments mieux adaptés à certaines catégories de jeunes enfants. La farine à base de grains maltés est donc utilisée très largement dans la production d'aliments pour enfants, mais, lorsque ces aliments sont préparés à partir du sorgho, il faut toujours faire très attention que le niveau de cyanure soit suffisamment bas car les enfants y sont particulièrement vulnérables.
En Inde, l'éleusine maltée est courante, et le produit est considéré comme supérieur au sorgho et au maïs. maltés. Des études ont montré que l'éleusine développe une plus forte activité de l'amylase que le sorgho et les autres mils (Seenappa, 1988). On a signalé que la germination du grain changeait la composition en acides aminés, convertissait l'amidon en sucre et améliorait la disponibilité de matière grasse, vitamines et sels minéraux.
Pal, Wagle et Sheorain ( 1976) ont mesuré les variations des constituants du sorgho et de divers mils (éleusine, mil chandelle, millet commun, millet indigène et moha du Japon) au cours du maltage. Les pertes étaient élevées pour l'éleusine et le millet des oiseaux. Le mil chandelle est celui qui présentait la plus forte activité d'alpha-amylase. Les niveaux d'enzyme amylolytique et protéolytique dans le mil chandelle malté étaient compara bles à ceux trouvés dans l'orge maltée. L'utilisation de 5 pour cent seulement de sorgho ou d'éleusine maltés réduisait la viscosité des aliments de sevrage (Mosha et Svanberg, 1983; Seenappa, 1988).
Transformation du grain traité à l'alcali
Pour produire un type particulier de tortilla populaire au Mexique, on fait cuire les grains de sorgho dans l'eau de chaux pendant peu de temps, on les laisse macérer toute la nuit, on les rince pour éliminer l'excès d'alcali, puis on les broie pour obtenir une pâte (Rizley et Suter, 1977).
Dans les traitements traditionnels, on utilise la cendre de bois pour réduire le niveau de tanin dans les sorghos bruns et en améliorer la qualité nutritionnelle. Muindi et Thomke ( 1981 ) ont signalé l'utilisation de cendre de bois en République-Unie de Tanzanie. Mukuru (1992) a décrit une technique pour réduire le taux de tanin, utilisée dans certaines parties de l'Afrique orientale et centrale où, à cause des ravages causés par les oiseaux, on ne cultive que des sorghos à teneur élevée en tanin. On fait d'abord tremper le sorgho toute la nuit dans une bouillie de cendre de bois et d'eau. Après égouttage, on le laisse trois ou quatre jours pour qu'il germe. Les grains germés sont séchés au soleil et pilés pour détacher la cendre de bois qui y adhère et éliminer les pousses qui contiennent de fortes quantités de cyanure. Le grain est ensuite moulu et utilisé pour préparer soit une boisson non alcoolique appelée obushara, soit une boisson alcoolique contenant environ 3 pour cent d'alcool appelé omuramba.
Transformation du grain blanchi
On a signalé que le blanchiment aidait à décortiquer le millet indigène (Shrestha, 1972) et à éliminer le caractère gluant du porridge d'éleusine cuit (Desikachar, 1975).
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