Table des matières - Précédente - Suivante
6.2.1 Préparations culinaires à base de sorgho, mil et maïs
170. Le sorgho, le mil et le mais sont les principales céréales utilisées pour l'alimentation humaine en Afrique. Différentes spécialités africaines sont fabriquées à partir de farines ou de grits de ces céréales, parmi lesquelles on peut citer le couscous, le tô, le foufou, le tuwo, uji, kisra, medida, injera, etc.
171. Les répartitions granulométriques typiques des farines traditionnelles de sorgho, mil et maïs sont données Table 12.
Table 12: Repartition granulométrique des farines de sorgho, mil et maïs
Sorgho |
Mil |
Mais |
|||
Ouverture de tamis m m | Poids p.100 | Ouverture de tamis m m | Poids p.100 | Ouverture detamis m m | Poids p.100 |
sur 850 | 5 | sur 420 | 2 | sur 700 | 3 |
sur 500 | 27 | sur 300 | 21 | sur 500 | 26 |
sur 300 | 45 | sur 180 | 47 | sur 250 | 55 |
sur 180 | 22 | sur 100 | 20 | sur 180 | 15 |
sous 180 | 1 | sous 100 | 10 | sous 180 | 1 |
172. Les bouillies de farines céréalières constituent sans doute la base de l'alimentation de la plupart des habitants vivant au sud du Sahara. Il existe deux types de bouillies que l'on distingue en fonction de la proportion de farine et d'eau entrant dans leur composition. Les porridges clairs ou bouillies claires résultent du mélange volumétrique de I partie de farine avec 3-4 parties d'eau. Les bouillies épaisses sont obtenues à partir d'un mélange volumétrique d'environ 1:2. Ces bouillies constituent sans doute les aliments les plus faciles et les plus commodes à préparer à partir des céréales. Les recettes utilisées sont très simples et varient peu d'une région à l'autre. Les ingrédients de base sont constitués par de l'eau et une farine de granulométrie moyenne.
6.2.1.1 Bouillies épaisses: ugali, foufou, tô, asida, banku ou akple, aprapransa, akassa etc. constituent autant de noms vernaculaires.
173. Ces bouillies épaisses sont préparées à partir de farines pures de sorgho, mil ou maïs, ou à partir d'un mélange de ces farines. La farine est simplement bouillie avec de l'eau jusqu'à obtention de la consistance désirée. Elle est mangée avec des sauces de légumes pouvant contenir de la viande ou du poisson.
174. Au Soudan, I'asida est préparé à partir de farine très fine qui est moulée ou façonnée avant d'être consommée. L'asida moulé est consommé avec de la viande, des légumes, ou un mélange de viande et de légumes, en sauce ou en ragoût.
175. Banku, akple et akassa sont des pâtes épaisses obtenues au Ghana et au Benin en faisant bouillir une farine crue ou une pâte fermentée de maïs, De la farine grillée de maïs cuite dans une soupe de palme donne une masse épaisse nommée aprapransa. Ce plat peut être accompagné de haricots et de poisson pour former un repas complet.
6.2.1.2 Bouillies claires: uji, nasha, medida, massa, akassa.
176. De la farine pure ou de la farine composée est jetée dans de l'eau bouillante et cuite de façon à former une bouillie claire consommée au petit déjeuner, parfois avec des morceaux de gâteaux de niébé.
177. Le nasha est fabriqué à partir d'une pâte fine fermentée, de la même façon que pour le kisra (voir alinéa 180). La pâte fermentée est diluée avec de l'eau dans une proportion de 1:5, puis tamisée à travers un linge. Elle est cuite en pot sur un foyer, sous agitation constante pour éviter qu'elle ne brûle ou ne forme des grumeaux. Le nasha est assaisonné après cuisson avec des épices ou des jus de fruit (mangue, abricot, karkade, tamarin) et du lait. Seule l'expérience permet de trouver la meilleure façon de préparer le nasha dont le goût et l'odeur sont caractéristiques. Il est normalement consommé au petit déjeuner, mais parfois aussi à la place d'un repas, particulièrement pour les enfants, les obèses et les femmes allaitantes. Il peut être mangé froid, ou chaud comme stimulant.
178. Le medida peut être préparé à partir d'une pâte fermentée, comme le nasha, ou à partir d'une pâte non fermentée. Dans le premier cas, le processus est le même que pour préparer du nasha, sauf que la dilution y est moins forte. Si l'on utilise de la farine non fermentée, on fait bouillir de l'eau, puis on ajoute peu à peu, sous agitation constante, de petites quantités de farines qui sont dispersées avec une spatule en forme de T que l'on fait tourner entre les deux paumes. Après cuisson, le medida est refroidi et dilué justqu'à obtention d'une consistance et d'un goût voulus au moment de la consommation.
179. Le massa est généralement préparé à partir de la farine de mil. La moitié d'une portion de farine de mil est cuite pour former une bouillie épaisse. L'autre moitié est ajoutée pour former une pâte qu'on laisse fermenter toute la nuit. Le mélange est assaisonné avec du sel, du poivre et des oignons, puis frit dans une poêle spéciale à massa. Le massa a une texture spongieuse et est consommé avec une bouillie de sorgho, de mil ou de maïs
6.2.1.3 Autres préparations culinaires: kisra, kenkey, injera, balila, pearl dura, githeri, eburowmo, fura.
180. Le kisra est un aliment de base fait au Soudan à partir de farine de manioc. Il s'agit d'une crêpe mince semblable à du pain azyme. On utilise de la farine complète ou une farine à 80-85 p. 100 d'extraction. La finesse de la farine joue un rôle important sur la texture du kisra. Il est fabriqué en mélangeant du levain, de la farine et de l'eau dans une proportion de 1:2:9 pour former une pâte qu'on laisse reposer et fermenter toute la nuit ( 12-16 heures). Le pH de la pâte fermentée est de 3,7-4,0 (acide).
Une crêpe acceptable, semblable à celles que l'on trouve en Europe, peut être préparée à partir d'une farine composée pour moitié de farine de blé et de farine de sorgho.
181. La pâte est cuite au four à une température de 160-180°C (320-356°F) pendant 30 secondes. Elle est étirée d'un côté et de l'autre puis placée dans un plateau ou un panier en paille. Le kisra est servi avec des sauces et des ragoûts (légumes, viande et légumineuses sèches). Mais il est également consommé comme un casse-croûte .
182. Le kisra est désormais commercialisé à petite et à grande échelle. Il est emballé dans des sacs en polyéthylène d'une contenance approximative de 200 g. et est vendu dans des épiceries et sur les marchés urbains (10 piastres/sachet). Il se conserve pendant 48 heures à la température ambiante. Surgelé, il peut être conservé pendant une semaine bien qu'il devienne friable.
183. Le kenkey est le plat principal préparé au Ghana à partir d'une pâte de maïs fermentée. La pâte est divisée en deux parties, dont l'une est cuite et mélangée avec la portion crue. Le mélange est façonné en boulettes qui sont enveloppées dans des feuilles sèches de bananier ou des rafles de mais, puis bouillies. Différents types de kenkey sont fabriqués dans différentes régions du Ghana, soit à partir de farine entière, soit à partir de grains décortiqués. Il est assaisonné avec du sel ou avec du sucre.
184. L'injera est une crêpe acide fermentée et levée, aplatie et ronde, qui constitue le pain éthiopien. Il est fabriqué à partir du teff (Eragrostis teff, ou E. abyssinica, une sorte de très petit mil). On peut préparer 18 galettes d'injera de 450 g à partir de 3 kg de farine de teff, 480 g de levain, 6 litres d'eau d'hydratation de la pâte, et 4 litres d'eau de cuisson.
La pâte est confectionnée de la façon suivante: tamiser la farine dans un récipient
- mélanger le levain avec les mains ou avec une grande cuillère en bois
- ajouter 3 litres d'eau et bien mélanger
- ajouter peu à peu 3 litres d'eau en remuant constamment et bien mélanger
- couvrir le récipient et laisser reposer la pâte pendant au maximum trois jours. Il est préférable de ne la laisser fermenter qu'une nuit, car la valeur nutritive de l'injera décroît avec la durée de fermentation.
La cuisson de l'injera est réalisée de la manière suivante: enlever l'eau qui s'est rassemblée au-dessus de la pâte ajouter 0,5 litre de pâte à I litre d'eau et faire bouillir
- mélanger 3 litres d'eau froide à la pâte restante
- mélanger la pâte diluée ci-dessus avec le mélange bouillant précédent et laisser reposer pendant trente minutes
- entretemps, faire chauffer le "metad" (poêle à injera)
- pour faire cuire l'injera, il faut verser la pâte dans le "metad" chaud préalablement graissé, en imprimant un mouvement circulaire allant de la périphérie au centre de la poêle
- lorsque des trous commencent à se former à la partie supérieure de l'injera, couvrir la poêle avec son couvercle et laisser cuire pendant 2-3 minutes
- utiliser environ un demi-litre de pâte par galette d'injera
- graisser la poêle avec de l'huile avant chaque cuisson.
185. L'injera peut être fabriqué à partir d'autres céréales comme du sorgho, de l'orge, du blé, du mais, du mil, du riz, ou par la combinaison de deux ou de plusieurs d'entre elles. On obtient une meilleure qualité d'injera avec du sorgho décortiqué qu'avec du sorgho entier. Mais, comparé à l'injera de teff, I'injera de sorgho se conserve mal, il est relativement amer et sec, ce qui n'est pas sans poser de sérieux problèmes d'acceptabilité. Pour surmonter ces handicaps, on utilise traditionnellement une farine composée de sorgho et de teff ou d'orge. Des essais réalisés à l'Institut Ethiopien de Nutrition ont montré que les qualités de conservation et de douceur de l'injera sont améliorées si l'on utilise une farine composée consituée de 50 p. 100 de teff et de 50 p. 100 de sorgho ou de mais.
186. Le balila est un plat constitué de grains entiers de sorgho bouillis, assaisonnés d'épices ou de sucre et de ghee. Au Soudan, le grain décortiqué et poli constitue le "sorgho perlé" (Fig. 30), qui se mange comme du riz blanchi auquel il s'apparente. Le temps de cuisson du sorgho perlé varie en fonction de la grosseur des grains et des variétés, les critères de qualité retenus lors d'essais étant la fermeté et le gonflement des grains cuits.
La recette standard de préparation du balila est la suivante:
Formulation
Grains mondés (pearl dura), g | 100 |
Sel, g | 3 |
Matière grasse, g | 3 |
Eau. ml | 450 |
Temps de cuisson: 30-40 minutes.
187. Plusieurs ethnies d'Afrique de l'Est consomment des grains entiers de mais, plus rarement des grits ou des semoules. Les recettes culinaires utilisent des grains entiers de mais en mélange avec des graines de légumineuses. Une recette typique consiste à jeter dans de l'eau bouillante des grains de mais préalablement lavés. La proportion étant de 1 volume de grains dans 3 volumes d'eau. Après environ 30 minutes de cuisson, on ajoute des graines propres de haricots ou de pois dans une proportion de I volume de légumineuse pour 2 volumes de mais. La cuisson est poursuivie pendant une demi-heure supplémentaire ou jusqu'à cuisson complète, le mélange étant auparavant salé. Ce plat, consommé dans la Province Centrale du Kenya, est appelé githeri. Un bon githeri doit posséder les caractéristiques suivantes:
- il doit être confectionné avec du mais blanc
- les grains cuits de mais ne doivent pas être cassés
- les graines de légumineuses doivent rester entières, ne pas former une purée
- le mélange doit être suffisamment sec pour ne pas coller aux doigts ou dans la bouche
- on doit pouvoir le conserver 24-48 heures sans altération.
188. Une variante de la recette précédente consiste à utiliser des graines immatures de maïs et de légumineuses; dans ce cas, ces graines sont cuites simultanément, à l'eau bouillante. On peut également ajouter des légumes verts et des pommes de terre au mélange mais/légumineuses, le tout étant réduit en purée après cuisson. De la même façon, on peut utiliser des grits de mais ou bien des brisures de blé ou de riz, encore que les grits de maïs, très cornés, soient plus longs à cuire que les brisures de riz ou de blé.
189. On peut obtenir un gruau épais en faisant bouillir des grains de mais dépelliculés ayant été trempés pendant toute la nuit. Les grains peuvent être également enveloppés dans des rafles après trempage et bouillis jusqu'à ce qu'ils soient tendres. Ils sont alors mangés avec des arachides bouillies ou avec des morceaux de coprah. Les grits de mais peuvent être utilisés comme substitut du riz pour préparer un plat semblable à du riz bouilli, appelé eburowmo au Ghana, ce qui signifie "mais-riz". Les grits de mais servent également à préparer un brouet clair. Chacun de ces différents plats à base de farine de mais ou de pâte de mais fermentée peut être mélangé avec une purée de bananes plantains mûres pour préparer un certain nombre de plats sucrés, frits ou rôtis.
190. La fura est une boisson à base de mil qui est sucrée avant d'être bue. Pour préparer de la fura, on fait bouillir des boules de pâte faites avec de la farine de mil. Après cuisson, les boules de pâtes sont pilées au mortier, puis mélangées avec de l'eau et des épices. Le mélange est à nouveau façonné en boules qui son roulées dans de la farine de mais pour éviter qu'elles ne collent. La fura est écrasée dans de l'eau sucrée avant d'être servie.
6.2.2 Préparation d'aliments à base de manioc
6.2.2.1 Manioc bouilli
191. Des racines de manioc épluchées et bouillies dans de l'eau jusqu'à cuisson complète servent d'accompagnement à des soupes de légumes et a des ragoûts. Le manioc peut être également pilé seul ou mélangé avec du plantain, du taro ou de l'igname bouillis, de façon à former une pâle épaisse nommée fufu qui est mangée avec une soupe.
6.2.2.2 Farine de manioc
192. Les racines de manioc sont pelées lavées coupées en morceaux et séchées au soleil. Un séchage artificiel peut être appliqué pendant la saison des pluies. Pour ce faire, les morceaux de racines sont disposés en couche mince sur un plateau exposé au feu.. Les chips de manioc séchés sont broyés au mortier puis moulus en farine. En taisant bouillir la farine dans de l'eau. on obtient une pâte semblable à du fufu.
6.2.2.3 Pulpe de manioc
193. La pulpe de manioc est un produit de transformation intermédiaire à partir duquel sont fabriqués du gari de la pâte, de la fécule ou du tapioca.
6.2.2.4 Yukayaké, agbeli kaklo, akple
194. Les racines pelées et lavées sont râpées et réduites en pulpe plus fine que pour la préparation de gari La pulpe, disposée dans des paniers, est mise à fermenter pendant une durée variable, comprise entre 12 heures et 3 jours selon le produit fini désiré. La pâte légèrement fermentée peut être étuvée pour former un gâteau spongieux appelé yakayaké qui constitue, au Ghana, un aliment de base consommé avec des soupes ou des ragoûts.
195. L'agbeli kaklo est un aliment consitué d'une pâte de manioc façonnée en croquettes ou en boulettes qui sont cuites à la grande friture. Il est consommé avec du coprah.
Un autre plat couramment consommé au Ghana avec des soupes ou des ragoûts est appelé akple, boule épaisse de pâte constituée pour un tiers d'une pâte fermentée de manioc qui est bouillie avec deux tiers de farine de maïs ou de pâte fermentée de maïs.
6.2.2.5 Le tapioca
196. Le tapioca est constitué de fécule de manioc granulée et partiellement gélifiée. De la fécule humide est pulvérisée par friction au travers d'un tamis grossier en bambou, puis rôtie dans une poêle huilée, sous agitation constante, de façon à provoquer une gélatinisation uniforme. Les granules sont étendus sur des claies surélevées pour être séchés au soleil jusqu'à une teneur en humidité d'environ 12 p. 100. Un tapioca de bonne qualité doit s'écouler librement, être exempt de contaminants sans saveur, et avoir une couleur blanche ou blanc-crème. Le tapioca est mis à tremper dans de l'eau avant d'être bouilli, ou bien il peut être mangé tel quel trempé dans du lait sucré.
6.2.2.6 Le gari
197. Le gari peut être mangé sous différentes formes. Trempé dans de l'eau froide additionnée de sucre et de lait, il donne un brouet clair. Par contre, additionné d'une quantité d'eau juste suffisante pour le faire gonfler, il se transforme en une masse compacte que l'on déguste avec des épices en conserve et avec du poisson ou de la viande en boîte. Une manière populaire de manger du gari est de le mélanger avec des haricots bouillis. Lorsqu'il est cuit, le gari est bouilli dans de l'eau pour former une pâte épaisse qui est destinée à accompagner des soupes de légumes ou des ragoûts.
En ce qui concerne la préparation du gari voir alinéas 73, 97-102.
Table des matières - Précédente - Suivante