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Chapitre VII - Cuisson-extrusion de farines enrichies pour la production d'aliments de sevrage

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198. Les points les plus importants à prendre en considération dans la fabrication d'aliments de sevrage sont la digestibilité, l'hygiène et la valeur nutritive. En ce qui concerne cette dernière, l'obtention d'une valeur nutritive élevée peut nécessiter l'emploi d'un mélange de différentes substances alimentaires, par exemple le mélange de céréales avec des graines oléagineuses ou des produits laitiers riches en protéines, de façon à supplémenter les céréales. Lorsque les composants du mélange sont tous d'origine végétale, comme les céréales et les tubercules riches en amidon, et les farines oléagineuses riches en protéines, il est nécessaire de soumettre la farine composée à un traitement thermique, ceci en vue de lui conférer une bonne digestibilité et de détruire des organismes pathogènes et des substances toxiques comme, par exemple, les inhibiteurs trypsiques du soja ou le gossypol des graines de coton. Au niveau industriel, les traitements thermiques sont appliqués à l'aide de procédés tels que le séchage sur cylindre et la cuisson. Mais ces dernières années ont vu le développement considérable du procédé dit de cuisson-extrusion plus facile à contrôler que les précédents, et qui pourrait être économiquement compétitif avec les autres traitements hydrothermiques. De plus, l'aptitude des cuiseurs-extrudeurs à transformer les végétaux, seuls ou en mélange, en aliments de haute qualité nutritive a joué un grand rôle dans le domaine de la fortification des aliments, particulièrement dans le tiers monde où les régimes sont essentiellement constitués de céréales et de tubercules.

7.1 Le procedé de cuisson-extrusion

199. Il existe différents types d'extrudeurs, mais dans sa conception la plus sim ple un extrudeur est composé d'un cylindre creux très lourd, nommé fourreau, dans lequel est ajustée une vis hélicoïdale tournant à vitesse modérée. Une ouverture, pratiquée à l'une des extrémités du fourreau, permet d'alimenter l'extrudeur en ingrédients, qui sont évacués par une ouverture beaucoup plus petite, nommée filière, située à l'autre extrémité du fourreau. La rotation de la vis engendre une haute pression et une élévation de température des ingrédients qui circulent dans l'extrudeur. Un supplément de chaleur peut être fourni par un fourreau manchonné ou par des inducthermes. Le fait de forcer les ingrédients à travers la filière de section réduite accroît la pression. Si les matières premières utilisées contiennent de 15 à 30 p. 100 d'humidité, elles vont se transformer en une masse semblable à une pâte fluide sous l'action conjuguée de l'accroissement de la température, de la pression, et des forces de cisaillement engendrées par la rotation de la vis. Lorsque cette masse comprimée par la filière est expulsée de l'extrudeur, la diminution subite de pression libère brutalement la vapeur surchauffée qu'elle contient, ce qui provoque son expansion. Plusieurs cuiseurs-extrudeurs ont été conçus comme des appareils à haute température et court temps de séjour, de façon à ce que la matière première soit soumise à une haute température pendant un temps très court seulement, ceci afin de minimiser les risques de dégradation thermique des nutriments. (Appareils HT/ST pour "High Temperature/Short Time" en anglais).

200. Les conditions optimales de fonctionnement des extrudeurs dépendent du choix des matières premières et du profil des produits finis désirés. La cuisson-extrusion confère des propriétés physiques et chimiques très particulières aux produits extrudés, ceci tout particulièrement lorsque des mélanges de différents produits amylacés sont extrudés et subissent des modifications durant l'extrusion. La gélatinisation de l'amidon est fonction du cisaillement, de la température et de la teneur en eau. La pression engendrée dans l'extrudeur provoque l'expansion de la matière extrudée, le degré d'expansion étant également fonction de la teneur en eau, de la température, de la pression et des propriétés des glucides contenus dans les matières premières utilisées. La gélatinisation de l'amidon confère aux produits extrudés des propriétés particulières de viscosité, d'absorption d'eau, de solubilité et de densité.

201. Les lipides ont tendance à s'oxyder, particulièrement lorsque les mélanges contenant des matières grasses sont extrudés à des températures égales ou supérieures à 19O°C (374°F). En se combinant aux molécules d'amidon, les graisses oxydées peuvent altérer la viscosité, la solubilité et la durée de conservation des produits extrudés Le rancissement oxydatif se reconnaît aisément à l'odeur et au goût de rance. L'altération des protéines, également possible à des températures de 190°C ou plus, peut, elle aussi, contribuer à dégrader la flaveur des produits extrudés. Mais, en revanche, les constituants toxiques de graines protéagineuses peuvent être inactivés par les hautes températures développées dans les procédés de cuisson-extrusion.

202. L'extrusion à sec, qui ne nécessite aucun conditionnement préalable des grains avec de l'eau ou de la vapeur, a débouché sur un grand nombre d'applications. Au cours des dernières décennies, différentes modifications et diverses études tendant à réduire les prix et les coûts de fonctionnement des extrudeurs ont été entreprises. Elles ont abouti, entre autres, à la conception d'extrudeurs "bon marché" (LEC pour "Low-cost Extrusion Cookers") spécialement adaptés à la production d'aliments destinés à la consommation humaine. Ces appareils ne nécessitent qu'un nombre restreint d'équipements de manutention des matières premières et des produits finis. Par définition, les cuiseurs-extrudeurs "bon marché" nécessitent des coûts d'installation compris entre 70.000 et 100.000 $ US (30-40 Millions F CFA en 1983/84) pour une capacité de production allant jusqu'à 1 to/h. Un investissement inférieur à 40.000 $ US (16 millions F CFA) comprenant l'équipement, le transport et le montage, a même été signalé. On verra plus loin (alinéa 209) que les coûts de production des produits fabriqués par ces extrudeurs "bon marché" sont relativement bas.

7.2. Essais d'extrusion d'aliments de sevrage

203. Des essais préliminaires d'extrusion d'aliments de sevrage riches en protéines ont été réalisés en 1976 en Tanzanie. Un extrudeur bon marché de type LEC (Brady No. 206 Crop Cooker), disponible à Nairobi, a permis de réaliser des produits de différentes compositions. La faisabilité du procédé avait été préalablement établie par l'Université d'État du Colorado, à Fort Collins, particulièrement en ce qui concerne la possibilité d'utiliser des mélanges à base de céréales et de légumineuses produites dans les pays en voie de développement. Les essais réalisés à Fort Collins ont montré que les cuiseurs-extrudeurs "LEC" étaient capables de fabriquer des aliments supplémentés pouvant contenir de 12 à 20 p. 100 de protéines selon la proportion de céréales et de légumineuses ou d'oléagineuses utilisées. Des études d'acceptabilité, portant sur des mélanges 70/30 et 80/20 de maïs/soja décortiqués et extrudés à Nairobi, ont été conduites en Tanzanie avec de bons résultats sur des écoliers et des mères sélectionnées à cette fin. A la suite de ces essais, un extrudeur LEC fut installé en Tanzanie en 1978. Dans d'autres projets de développement, deux extrudeurs (Brady 206 Crop Cooker et Insta-Pro Modèle 500) ont été utilisés pour déterminer les limites de production d'aliments de sevrage à base de céréales et de farines de coton; ces dernières, notamment les farines issues de graines sans gossypol (glandless), se prêtent de manière remarquable à la supplémentation nutritionnelle. La teneur en gossypol des graines de coton a été considérablement réduite dans la plupart des cas. D'autres rapports d'essais, réalisés avec succès à Nairobi, montrent que des mélanges à base de riz, de maïs, de sorgho, d'arachides et de sésame ont été bien acceptés par les utilisateurs.

204. Des mélanges réalisés en Tanzanie et contenant 70 p. 100 de maïs. et 30 p. 10() de soja ont donné entière satisfaction en ce qui concerne leur acceptabilité et leur valeur nutritionnelle. Les graines de maïs. et de soja, préalablement décortiquées, sont dosées et mélangées dans un broyeur spécial, puis extrudées dans un cuiseurextrudeur Brady No. 2160 Crop Cooker. Après refroidissement, le produit extrudé est moulu puis mélangé avec du lait en poudre, des vitamines et des sels minéraux. Le produit fini, destiné aux enfants et aux tout petits, peut être préparé comme un porridge instantané pour le petit déjeuner, mais il est préférable de le faire cuire à feux doux pendant quelques minutes afin d'obtenir un porridge plus onctueux. La composition et la valeur nutritionnelle de ce porridge sont données respectivement Tables 13 et 14. Les résultats des tests d'acceptabilité réalisés durant la phase de développement de ce produit, désormais commercialisé sous le nom de LISHA, sont donnés Table 15.

Table 13: Composition du LISHA (p. 100)

Grits de maïs 65
Graines de soja décortiquées 28
Lait en poudre 5
Mélange de vitamines 0,2
Mélange de sels minéraux 1,8

Table 14: Analyse nutritionnelle du LISHA (p. 100)1

Protéines (N x 6.25) 19,2
Humidité 6,1
Lipides 7,3
Cendres 3,8
Fibre 1,1
Glucides solubles 64,5
Calories (p. 100 gr) 392,0
Coefficient d'efficacité protéique (CEP) 2.73 tel quel: équivalent caséine = 2,23  

1Les vitamines et les sels minéraux n'ont pas été déterminés.

Table 15: Taux d'acceptabilité du LISHA (p.100)

Clinique MCH Très bon Bon Acceptable Mauvais Très mauvais
Mwananyamala (71)1 66.2 32.4 1.4 0 0
Ilala (66) 56.1 40.9 3.0 0 0
Tameke (93) 41.9 55.9 2.2 0 0

1 Les chiffres entre parenthèses correspondent au nombre de personnes ayant participé au test.


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