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7.3.2. Fumigation

La fumigation consiste à traiter les grains à l'aide d'un gaz toxique. Ce gaz appelé fumigant tue les insectes s'il est maintenu suffisamment longtemps à une certaine concentration au contact des grains. L'intérêt majeur de la fumigation est la faculté du gaz insecticide de pénétrer à l'intérieur du grain et donc de détruire les oeufs, larves et nymphes qui s'y développent.

7.3.2.1. Notions de bases

a) DÉFINITION DU FUMIGANT

«Substance qui à une température et à une pression données peut être produite sous forme gazeuse à une concentration mortelle pour une espèce vivante donnée».

- Les gaz diffusent plus ou moins rapidement en fonction de leur densité et de la température.

- Une partie des gaz peut être adsorbée, c'est-à-dire rester fixée à la surface des denrées et sans action sur les insectes. Une partie peut, plus rarement, être absorbée à l'intérieur de la denrée (si elle y réagit chimiquement il peut alors y avoir formation de résidus...).

Plus la surface de contact grain-pz est grande plus l'adsorption est importante (petits grains, cellule remplie, grain rugueux...). L'adsorption augmente lorsque le dosage, la teneur en eau, le temps de contact augmentent. Elle diminue lorsque la température augmente.

b) NOTION DE CONCENTRATION ´ TEMPS

Cette notion est essentielle pour bien mener la fumigation, Pour une espèce d'insecte donnée et pour une température donnée de la denrée, la donnée de base est la concentration effective en gaz et le temps pendant lequel elle agit. Le produit concentration x temps - appelé C.T. - est exprimé en mg x h/l (ou g x h/m³).

Le C.T. peut être représenté comme suit:

Fig. 223: Représentation du C.T. théorique.

Remarque:

La concentration effective étant la seule efficace, il doit être tenu compte des fuites au cours du gazage et de la sorption de la denrée pour déterminer la dose à appliquer.

7.3.2.2. Fumigants

Les fumigants les plus employés sont actuellement le phosphure d'hydrogène ou phosphine (PH3) et le bromure de méthyle (CH3 Br).

a) LE PHOSPHURE D'HYDROGÈNE (PH3)

- Présentation

Le PH, est produit par réaction entre un phosphure métallique (phosphure d'aluminium ou de magnésium) et l'eau atmosphérique:

2 AlP + 6 H2 O (r) 2 PH3 + 2 Al (OH)3 + chaleur
Mg3 P2 + 6 H2 O (r) 2 PH3 + 3 Mg (OH)2 + chaleur

Les réactions, très exothermiques, sont ralenties en associant du carbamate d'ammonium et de la paraffine au phosphure métallique.

Il est commercialisé sous différentes présentations:

Fig. 224: Différentes présentations du PH3.

Il existe également des plaquettes:

• Phosphure d'aluminium (90 g de produit contenant 30 g de m.a.).
• Phosphure de magnésium (206 g de produit contenant 33 g de m.a).

- Principales propriétés

• Le PH3 a une masse volumique proche de celle de l'air: 1,4 g/l (1 g/m³ correspondra à environ 700 ppm)

• Il est très faiblement soluble dans l'eau et les graisses. Il peut donc être utilisé sur les produits oléagineux, le cacao et les produits frais.

• Il est instable en dépression; on ne peut donc pas l'utiliser en chambre à vide.

C'est un gaz qui diffuse très bien. Cette qualité intéressante pour le traitement pose cependant des problèmes d'étanchéité de l'enceinte. En effet sa molécule très petite (quelques Angströms) lui permet de traverser aisément le banco, la brique, le béton... Par contre, il est bien arrêté par les bâches plastiques, les peintures plastiques... (une barrière plastique de quelques centaines de microns d'épaisseur est plus efficace que plusieurs dizaines de centimètres de béton).

Il réagit très peu chimiquement (pas de résidus) mais attaque certains métaux dont le Cuivre. Lors de son emploi on devra donc veiller à la protection des installations électriques, des moteurs...

- Dose d'application

En zones tropicales où les températures des produits peuvent atteindre 25° C - 30° C, des doses de 1 à 2 g/m³ pour un traitement de trois jours devraient être efficaces. C'est, comme nous l'avons déjà signalé, le volume total de l'enceinte à fumiguer qui est à prendre en compte et non pas le tonnage de produit.

Lorsque l'on dispose de temps pour procéder au traitement, on aura toujours intérêt à traiter à petite dose pendant longtemps plutôt qu'à haute dose pendant peu de temps. Cela permet d'économiser du produit mais surtout d'utiliser une plus faible concentration plus facilement atteinte malgré d'éventuelles fuites. D'autre part, à doses trop fortes, il peut y avoir un effet narcotique sur les insectes mais pas de mort.

PRINCIPALES VALEURS DONNÉES PAR LES TABLES DE WAINMAN - C.T. en g x h/m³

à 25° C pour

2 jours

4 jours

7 jours

10 jours

Sitophilus zeamaïs

142

87

45,8

4,8

Trogoderma granarium

38

30,6

13,6

4,8

Plodia interpunctella

77

3,3

3,7

4,8

Ephestia cautella

77

3,3

3,7

4,8

Prenons par exemple Sitophilus zeamaïs:

A 25° C, pour une fumigation de 4 jours le C.T. est de 87 donc la concentration à appliquer sera: C = 87/(4x24) = 0,9 g/m³ arrondi à 1 g/m³.

Une deuxième raison milite en faveur d'un temps de fumigation assez long. Si, dans des conditions normales, la libération du gaz a lieu 30 mn à 1 h après que l'on ait introduit les pastilles, il arrive que dans une atmosphère très sèche, le produit commercial ait du mal à se décomposer pour libérer le gaz. Ce problème peut survenir en régions sahéliennes. Selon le TSPC il faut, avec des grains (mil) à 35° C et 7,5 % d'humidité, 96 heures pour obtenir des concentrations maximum en PH3. Si l'on accélère le dégagement en humidifiant les tas par une pulvérisation aqueuse il faut malgré tout 72 h pour atteindre la concentration maximum.

Au Sahel, on a donc intérêt à prévoir des temps de fumigation au PH3 d'au moins 4 à 5 jours.

La société DEGESCH propose maintenant des plaquettes à base de phosphure de magnésium signalées comme se décomposant bien en milieu sec.

b) LE BROMURE DE MÉTHYLE (CH3 Br)

- Présentation

Gaz fréquemment utilisé pour les fumigations, le bromure de méthyle est commercialisé sous forme liquide en bouteilles de 20 ou 40 kg. Le liquide est vaporisé par réchauffage. 1 kg de liquide donne 250 l de gaz (donc 1 g de CH3 Br/m³ = 250 ppm).

- Quelques propriétés

• Gaz plus lourd que l'air: 4 g/l (air: 1.3 g/l) il nécessite une homogénéisation pour pénétrer le grain.

• Il est insoluble dans l'eau mais soluble dans les graisses ce qui peut poser des problèmes de résidus sur oléagineux et cacao.

• Incolore et inodore, il est difficilement décelable. On lui ajoute souvent un avertisseur: la chloropicrine (lacrymogène).

• Il est beaucoup Plus sorbé que le PH3 (environ 30 %), et contrairement à ce dernier il est assez bien arrêté par la maçonnerie, les briques plates et le plâtre (molécule plus grosse).

• Il attaque l'aluminium et le magnésium, et sous forme liquide c'est un excellent solvant; les conduites devront être en Rilsan ou en caoutchouc, ou en téflon.

- Dosage

L'action sur les insectes est plus rapide que celle du PH3. A 20° C le C.T. est en général de 150-200 g x h/m³ et à 30° C de 40 à 70 g x h/m³. Dans la pratique les doses appliquées sont plus élevées, de l'ordre de 15 à 20 g/m³ pendant 16 à 24 h soit plus de 300 g x h/m³. Les insectes sont tués en 10 à 12 heures.

Contrairement au PH3, le bromure de méthyle peut avoir une action phytotoxique sur les semences. Des problèmes pourront apparaître si la teneur en eau des semences est trop forte, si la température est trop forte, si la durée de la fumigation est trop longue (il ne faut pas dépasser 24 h), et enfin si la dose est trop élevée (> 40 g/ m³).

A trop forte dose, le bromure de méthyle peut également laisser un goût aux farines.

COMPARAISON BROMURE DE MÉTHYLE/PHOSPHURE D'HYDROGÈNE

Présentation

Bromure de méthyle CH3 Br

Phosphure d'hydrogène PH3

Liquide en bouteilles

Pastilles, pilules, plaquettes

Application du produit

Matériel spécial

Simple: mise en place des pastilles

Sur céréales en mouvement

Non

Oui

Diffusion dans les grains

Moyenne (recyclage nécessaire)

Bonne

Pénétration dans produits emballés

Bonne

Excellente

Résidus

Éventuellement, mais peu

Pas de résidus

Phytotoxicité sur semences

Possible à forte dose

Aucune

Durée fumigation

12-24 h

3-5 jours minimum (5 jours en zone très sèche)

7.3.2.3. Méthodes de fumigation

a) FUMIGATION SOUS BÂCHES

C'est une technique très utilisée pour le traitement des denrées en sacs ou le traitement de petites cellules de stockage en vrac. Ne nécessitant l'emploi que de matériels mobiles, elle est très pratique et permet de s'adapter à des situations diverses,

Il existe de nombreux types de bâches de différentes tailles et différentes épaisseurs. On peut utiliser des bâches simples en polyéthylène ou des bâches armées de nylon recouvert de néoprène, de chlorure de polyvinyle (PVC) ou de caoutchouc synthétique. Les épaisseurs sont variables, mais pour les bâches en polyéthylène en général 150 µ à 200 µ. Pour le PH, il est préférable d'utiliser par exemple deux bâches de 100 µ superposées plutôt qu'une seule de 200 µ.

Les bâches sont jointes entre elles par recouvrement sur 1 m de largeur et enroulement. Elles doivent reposer sur le sol sur une largeur de 65 cm à 1 m. L'étanchéité avec le sol peut être réalisée avec du sable (c'est la meilleure solution mais elle n'est pas toujours possible) ou plus souvent avec des boudins plastiques remplis de sable. Pour rester maniables ces boudins auront 10 cm de diamètre et pas plus d'un mètre de longueur.

- Gazage au PH3

Après avoir calculé le volume recouvert par la bâche et défini la dose, on peut connaître la quantité de produit commercial à utiliser.

Considérons que l'on traite contre Sitophilus zeamaïs un lot de 50 m³ à 25° C, et que l'on prévoit 7 jours de fumigation. On retient la dose de 1 g/m³. Il faudra 1 g/m³ x 50 m³ = 50 g de PH3.

Si l'on utilise des pastilles (3 g de produit commercial contenant 1 g de PH3) il faudra 150 g de produit commercial soit 50 pastilles. Ces dernières étant vendues en tubes de 30 unités, on devra utiliser 2 tubes soit 60 pastilles (tout tube ouvert doit être intégralement vidé).

Pour traiter des grains en sacs, les comprimés sont répartis régulièrement autour de la pile. Dans les céréales en vrac, les comprimés sont placés dans la masse à l'aide d'une canne sonde injectrice.

Mesure de la concentration en PH3

A partir de plusieurs points de mesure répartis dans le tas et reliés à l'extérieur par de fins tubes plastiques, il est possible de suivre l'évolution de la concentration du fumigant en employant: soit des tubes réactifs gradués en ppm (100 à 1000 ppm), soit un appareil spécial appelé phosphinomètre ou fumigamètre.

Fig. 226: Tubes réactifs. (Doc. DRAGER.)

Fig. 227: Produit Concentration - Temps.

Exemple (Fig. 227):

C.T. théoriquement appliqué = 1 g/m³ x 168 h = 168 g.h/m³
C.T. réel = (0,85 x 96)/2 + [(0,85 + 0,3) (168-96)]/2 = 82,2 g.h/m³
C.T. requis = 0,3 g/m³ x 168 @ 50 g.h/m3
Le C.T. appliqué est donc bien supérieur au C.T. requis.

Sécurité: Pendant la fumigation, des pancartes doivent avertir qu'un produit dangereux est utilisé. Après la fumigation, le dégazage s'effectue en ôtant la bâche. Cette opération est réalisée en deux temps:

• on soulève et replie la bâche sur un côté ou deux côtés opposés du tas pour permettre une première aération,

• après un laps de temps (1 h), la bâche est totalement retirée.

Pendant le dégazage les locaux doivent être bien aérés.

- Gazage au bromure de méthyle

La technique de bâchage est la même, mais il existe plusieurs méthodes de distribution du produit.

• Pulvérisation directe sur le tas

Cette pulvérisation de bromure liquide peut s'effectuer au moyen d'une rampe de pulvérisation en rilsan ou nylon avec petit gicleur en cuivre disposé dans une rigole métallique en haut du tas.

• Gazage avec tuyau coulissant

Le tuyau étant placé au plus loin sous la bâche, la dose est repartie en le retirant progressivement.

• Gazage par injection sur un poind chaud

Le bromure de méthyle liquide est vaporisé dans un petit récipient réchauffé par de l'eau chaude ou par une résistance électrique. La diffusion est améliorée en prévoyant un petit ventilateur axial (1 renouvellement horaire de l'enceinte) tournant pendant 1 à 2 h.

Fig. 228: Injection de bromure liquide sur un point chaud. (Schéma CEEMAT.)

• Gazage directement sous forme gazeuse

Le bromure de méthyle est injecté sous forme gazeuse. De petits ensembles généralement mobiles sont prévus à cet effet, ils sont constitués:

* d'une bouteille de bromure de méthyle liquide,
* d'un bromidoseur,
* d'un réchauffeur.

Le réchauffeur est un serpentin de cuivre plongé dans une eau glycérinée, réchauffée par un brûleur à gaz (propane par exemple).

A la sortie du réchauffeur le bromure de méthyle doit être gazeux, est injecté à une pression de 3 à 6 bars.

Enfin il est prévu un système de ventilation au niveau de l'introduction du gaz dans l'enceinte (5 renouvellements horaires).

Fig. 229: Matériel mobile de gazage. (Schéma CEEMAT.)

Mesure de la concentration

Elle s'effectue au moyen d'un analyseur de gaz (catharomètre) qui mesure la thermoconductivité du bromure de méthyle (3 fois supérieure à celle de l'air). L'appareil donne directement la mesure en ppm.

Fig. 230: Schéma de la mesure tic la concentration en gaz.

Fig. 231: Courbe de la concentration en CH, Br.

Les mesures s'effectueront 1/2 heure après le gazage, à la moitié de la fumigation (12 h) et à la fin (24 h).

On pourra ainsi vérifier la valeur du C.T. appliqué (sous réserve que les points de mesures aient été correctement répartis (haut - milieu - bas - en diagonale).

La détection des fuites peut se faire au moyen d'une lampe à halogénure. En présence de gaz, la flamme bleue vire au vert.

Dégazage

Le temps de dégazage peut être plus long qu'avec le PH3 car le bromure de méthyle sorbe beaucoup plus. Il faut donc attendre que tout le gaz sorbé se libère. Le responsable de la fumigation doit indiquer quand la reprise, sans risques des activités sur les lieux de stockage, est possible. En pratique la durée du dégazage est sensiblement égale à celle de la fumigation.

b) SYSTÈMES DE FUMIGATION SPÉCIALISÉS

- Les chambres de désinsectisation

La chambre doit être étanche aux gaz (en prenant un soin particulier pour l'étanchéité de la porte), de hauteur réduite pour utiliser au mieux le volume total, placée dans un endroit aéré et éloigné des locaux d'habitation.

L'étanchéité est assez facile à réaliser en prévoyant des revêtements plastiques sur les murs (peinture plastique). Pour les accès, il existe des portes métalliques spécialement conçues pour être étanches, mais on peut également prévoir de simples portes en contre-plaqué marine par exemple bien étanchéifiées (utilisation de bandes adhésives de 5 à 8 cm de large). Une bonne étanchéité permet de diminuer les doses appliquées.

Un système de ventilation interne assure une bonne homogénéisation du mélange air-fumigant. Le mélange, aspiré au niveau du sol est renvoyé par un ventilateur au niveau supérieur de la chambre (Cf. fig. 232). Le gazage et le dégazage sont des opérations aisées.

L'inconvénient de ces installations est d'être fixes - il faut donc y amener le produit à traiter - et de n'offrir aucune souplesse quant aux quantités à traiter. Enfin, elles représentent un investissement important.

Fig. 232: Schéma d'équipement mixte silo et chambre. (Doc. SPAM.)

- Fumigation en silo spécialisé

Dans les installations de stockage en vrac, il est conseillé de prévoir une cellule et hôpital» étanche équipée pour le traitement des grains. Dans la plupart des cas une cellule pouvant contenir 1/30 du stock total de l'installation est suffisante. Pour être étanches, les cellules doivent être en tôle soudée ou béton vibré. L'air est recyclé par un turboventilateur qui l'aspire au sommet de la cellule et le refoule, additionné de fumigant, à la base. Le renouvellement de l'air doit être de 10 fois le volume de la cellule par heure. En 1 h le fumigant est convenablement réparti dans la masse de grains. La durée du traitement est de 24 h. En pratique, peu de silos sont équipés de ce type de cellule, c'est pourquoi, le plus souvent, pour le traitement en silo, l'emploi de comprimés de PH3 est plus aisé.

Les pilules sont introduites soit manuellement avec des cannes sondes spéciales pour les cellules de faibles hauteurs (5 à 8 m); soit à l'aide de distributeurs automatiques de comprimés qui, au moment du chargement de la cellule, libèrent régulièrement les comprimés dans le grain au niveau des appareils de manutention (bandes transporteuses, redler). Cependant, comme le temps de remplissage peut être long (6 à 7 h pour remplir une cellule de 1000 t à 150 t/h), et que les premières pastilles introduites peuvent libérer leur gaz après 1 à 2 h, il est nécessaire, pour la sécurité, de prévoir un système d'extraction des gaz pendant la période de remplissage.

Les cellules doivent être équipées d'un système de ventilation pour le dégazage. Il faut prévoir d'importants débits d'air: 60 à 100 renouvellements horaires. Le dégazage peut durer plus ou moins longtemps en fonction de la sorption. Le gaz est évacué dans l'atmosphère où il se dilue et se dégrade naturellement.

- Fumigation sous vide

C'est une technique très rapide qui fait appel à des installations spécialisées le plus souvent montées dans des centres d'expédition. Us sacs sont placés dans des autoclaves, généralement en acier, résistant à la pression. Des pompes puissantes font le vide en 10 à 15 mn et l'air est remplacé par des vapeurs de bromure de méthyle qui pénètrent profondément dans les sacs. Le traitement dure entre 1 h 30 et 3 h (usines à Abidjan-Douala-Lomé...).

Cette technique, très efficace, demande cependant un appareillage coûteux qui se révèle souvent sous-dimensionné pour traiter tous les apports. Même si la puissance des stations était à l'échelle des besoins, les problèmes de manutention et de transport resteraient un obstacle sérieux à l'adoption généralisée de cette technique laquelle, par ailleurs, est inutilisable avec le PH3 qui a l'inconvénient d'exploser sous vide.

7.3.2.4. Protection contre les fumigants

Les fumigants sont des produits très dangereux qui ne peuvent être utilisés que par des équipes spécialisées averties et correctement formées.

- Le phosphure d'hydrogène

Le PH, est un poison des cellules vivantes et agit au niveau de l'appareil respiratoire. A faible concentration il produit des troubles digestifs et une gène respiratoire; il est rapidement mortel. à 2 000 ppm et létal à partir de 300 ppm. Son odeur «métallique» caractéristique est perceptible à partir de 1 à 3 ppm et permet d'alerter l'individu averti.

- Le bromure de méthyle

Il agit au niveau des cellules nerveuses et les premiers symptômes sont le picotement des yeux (chloropicrine) suivi de mouvements anormaux, de convulsions et enfin de corna. Dès qu'un individu présente des difficultés de prononciation il doit être aussitôt évacué à l'extérieur du lieu de fumigation. C'est un gaz «sournois» car il n'a pas d'odeur. C'est pourquoi on lui ajoute de la chloropicrine (produit lacrymogène).

Plus lourd que l'air, il aura tendance à s'accumuler sur le sol ou dans les bottes des ouvriers où il provoquera, par contact, des brûlures des membres.

Pour déceler ces fumigants on utilise une lampe à halogénure pour le bromure de méthyle et, pour le PH3 des tubes réactifs appropriés pour les faibles concentrations (0,1 à 100 ppm).

Matériel de protection

• protection des mains: gants en néoprène,
• protection respiratoire: elle sera assurée par un masque à gaz (Fig. 235). Il existe différents types de masques, allant des masques protégeant le nez et la bouche, aux masques intégraux. Pour un traitement au bromure de méthyle une visière est nécessaire pour protéger les yeux.

Les cartouches à adapter sur les masques contiennent un élément actif spécifique pour retenir chaque gaz toxique. Elles portent une référence (lettre caractéristique), une date de péremption et sont de couleur caractéristique.

Exemple:

Produit

Lettre caractéristique

Couleur

Bromure de méthyle

A

marron

PH3

B

grise

Il existe des cartouches mixtes A et B (marron et grise) pouvant donc être utilisées pour les deux gaz, mais elles ont une moins grande autonomie que les cartouches spécifiques.

Une cartouche dure environ 30 mn. Dès que l'opérateur commence à sentir le fumigant la cartouche est saturée (cet avertissement n'est pas toujours évident avec le CH3 Br).

Certaines cartouches contiennent en plus un filtre pour les matières en suspension. Rappelons que les masques antipoussières sont totalement inefficaces pour protéger contre les fumigants.

Rappelons aussi que pour les traitements de contact comme le poudrage ou la pulvérisation, des masques sont également nécessaires, des cartouches filtrantes sont prévues à cet effet.

Fig. 233: Demi-masque simple. (Doc. DRAEGER.)

Fig. 234: Cartouche gaz + matière en suspension. (Doc. DRAEGER.)

Conclusion:

Nous venons de voir succinctement quels étaient les systèmes de fumigation et les produits utilisés.

La fumigation permet donc un traitement curatif total de la denrée; toutes les formes d'insectes sont tuées. Cependant ce traitement n'a aucune persistance, c'est-à-dire que dès la fumigation terminée, des insectes peuvent venir réinfester le lot et recommencer à se développer dans les stocks. Pour éviter cette réinfestation on peut cependant envisager de recouvrir les piles avec des bâches en coton ou en plastique.

Résumé: CRITÈRES DE CHOIX DU TYPE DE TRAITEMENT INSECTICIDE

fumigation

insecticides de contact

- denrée emballée - pas d'étanchéification possible des structures
- traitement curatif immédiat - pas d'équipement de fumigation
- manutention impossible - pas de technicité (niveau pay san)
- pas de résidus sur denrées alimentaires (ex.: cacao) - traitement rémanent

Avantages:

Avantages:

- traitement curatif total - protection dans le temps
- peu ou pas de résidus - rémanence 6 mois, avec pyrimiphos-méthyl

Inconvénients:

Inconvénients:

- enceintes étanches - les formes cachées ne sont pas détruites (important pour les semences)
- homogénéisation nécessaire avec CH3 Br - répartition de l'insecticide par fois difficile
- produit très dangereux. Nécessité d'une bonne étanchéité - risques éventuels de résidus
- traitement curatif: risque de réinfestation  


Dans la mesure du possible, il est évident qu'un emploi des deux techniques combinées constitue une bonne solution, par exemple: fumigation dès réception puis traitement par insecticides de contact.

7.3.3. Magasins fumigables

Pour lutter contre les insectes, des magasins fumigables ont été construits. C'est le cas notamment au Sénégal où, pour lutter contre Trogoderma granarium ravageant les stocks de mil et sorgho. Plusieurs magasins de ce type (6 000 t de stockage) (Fig. 235) ont été construits dans la région de Thiès.

Description

• Capacité

:

500 t

1000 t

• Dimensions (L x l x h)

:

20 x 14,50 x 4,40

40 x 14,50 x 4,40

• Sol

:

sur remblai compacté, dalle de 12 cm, en béton armé avec joint de dilatation bitumeux.

• Élévation

:

agglomérés creux de 15 cm enduits 2 faces avec, intérieurement, revêtement au plâtre et peinture plastifiée.

• Charpente

:

poteaux en béton armé de 0,40 x 0,20 en saillie à l'extérieur du bâtiment. Fermes métalliques type treillis en cornière - travée de 5 m.

• Couverture

:

bac aluminium. La toiture est prévue sans faîtière. Sur la largeur elle est constituée d'une seule plaque de 12 m de long reprise aux deux extrémités par deux plaques de 3 m permettant un débordement de 1 m. Le débordement est également de 1 m en pignon.

• Aération

:

deux ouvertures de 1 m x 0,50 m en pignon. Ces ouvertures sont équipées d'un vasistas intérieur et de grillages moustiquaire et anti oiseaux.

• Portes

:

en pignon: une porte de 2,4 m x 2,5 m à battants s'ouvrant à la française (2 portes, une par pignon, pour les magasins de 1000 t).

• Éclairage

:

assuré dans chaque long pan par un ensemble de 10 briques de verre par travée.

Le stockage s'effectue en sac et il est prévu une fumigation au phosphure d'hydrogène.

Ces magasins ont donc été conçus en recherchant la plus grande étanchéité possible, condition nécessaire pour ne pas devoir utiliser des doses pléthoriques de fumigants toujours coûteux.

Nous savons que le béton (et notamment l'aggloméré creux), ne constitue pas une barrière étanche au fumigant; un revêtement intérieur plastique (peinture vinylique par exemple) est donc indispensable. Une attention particulière doit être apportée aux liaisons mursol et mur-tôles. La première est réalisée par un mélange sablegoudron et la seconde par un rajout collé. Toutes les fissures sont correctement mastiquées.

La maintenance doit être correctement suivie pour éviter toute apparition de fuites.

De par leur conception, m magasins ne peuvent être utilisés que pour du stockage à long terme. En effet, après fumigation, on ne pourra pas ouvrir le magasin pour y travailler ou y retirer une partie du stock car on risquerait alors une réinfestation. Donc, lorsque l'on ouvrira le magasin, ce sera pour le vider totalement de son stock. Ces magasins peuvent difficilement servir en utilisation classique en raison de leur manque d'aération (aération des denrées et conditions de travail du personnel).

Les «silos souples», ou structures en plastique pour le stockage en sacs, souvent utilisés pour les stocks de sécurité en cas d'urgence, constituent également des structures fumigables. Cependant, dans les silos souples, pour éviter les problèmes de dégradation, les produits doivent être stockés très secs, ce qui est une condition défavorable à la décomposition des comprimés de PH3.

Enfin la solution consistant à transformer un magasin classique en magasin fumigable est dans bien des cas difficile à mettre en œuvre. Toutefois les magasins en banco, de très grande épaisseur, peuvent être fumigables sous réserve d'une obturation préalable des fuites fissures, portes, plafonds, etc.

Sur ce principe, de petits magasins villageois fumigables sont actuellement en cours de mise au point dans le but de lutter plus efficacement contre l'extension du Prostephanus Truncatus en particulier.


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